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And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?


 
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And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years? :: 

Demons & Angels

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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Sam 6 Aoû - 21:47
Ni une ni deux, après avoir discuté des tenants et des aboutissants, l’opération tant attendue était programmée pour le lendemain. Le délai semblait affreusement tôt pour Eugène qui semblait n’avoir aucun temps pour s’y préparer psychologiquement. Et en même temps, la seule préparation psychologique dont il était capable, c’était de faire monter son angoisse en imaginant des scénarios tous plus catastrophiques les uns que les autres. Donc ce n’était pas plus mal. Plus tôt cette histoire serait derrière lui et mieux il se porterait. Evidemment, il ne ferma pas l’œil de la nuit et Carter vint le matin même pour le ramasser à la petite cuillère tout en lui rasant les cheveux. Le médecin fit de son mieux pour être bienveillant et tenter d’alléger l’atmosphère par de l’humour mais le médium ne put malheureusement que sangloter sa détresse à partir du moment où le bruit électrique et le contact des vibrations sur sa tête se fit entendre. Il n’osa pas ouvrir les yeux jusqu’à ce que les cheveux tombés aient définitivement disparus à la poubelle. Carter semblait penser que des compléments alimentaires pouvaient les faire repousser plus vite. Il ne rechignerait pas à les prendre.

Puis Fanella était arrivée et il avait eu du mal à la regarder dans les yeux. S’il avait eu un sachet en papier ou un sac poubelle, il aurait caché sa tête dedans. Heureusement que la machine tampon était éteinte sinon il aurait certainement vu à travers elle à quel point il était hideux. Eugène aurait préféré qu’elle n’ait pas à le voir dans cet état. Il n’entendit que vaguement ce qu’elle lui disait, ses yeux fatigués figés sur ses mains qu’elle serrait fort dans les siennes. Son contact si doux et si ferme à la fois lui donna au moins un peu d’énergie pour accepter ce qui allait s’ensuivre. Elle lui parla de la machine tampon qui était bientôt terminée et il s’accrocha aux paroles qui l’encouragèrent le plus ; l’idée qu’ils puissent aller se promener tous les deux lorsque tout cela serait fini.

Après elle dut forcément prendre congé et Carter et Mandalini revinrent prendre le relais. Eugène n’avait pas peur de mourir ; il était convaincu de la revoir après cette horrible expérience, peu importe les conséquences qu’il aurait à subir. Ce fut un peu sa ligne directrice tout le long de l’opération, même si cela ne l’empêcha aucunement de paniquer à peine installé dans la chaise. Impossible de voir le chirurgien ni ce qu’il faisait. Il n’y avait que le psychiatre en face de lui sur lequel il essaya de se concentrer mais il voyait parfois son visage se superposer avec celui d’autres scientifiques au visage plus durs, venus d’un autre âge. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, lui donnant presque la nausée et à chaque question sur son état physique ou mental, il n’était capable que de donner de courtes réponses, presque à bout de souffle.

Quand Mandalini commença, même s’il ne sentit absolument aucune douleur, il ne put s’empêcher de perdre pied dans ses souvenirs à l’idée qu’il soit en train d’ouvrir sa tête comme une coquille d’œuf. Il ne savait pas si les sons qui provenaient à ses oreilles étaient des cris ou des gémissements, pas de douleur, davantage de pure terreur jusqu’à ce que Carter lui dise que tout se passait bien et lui demande de le regarder. Il tâcha de se concentrer sur cette tâche comme le chirurgien se concentrait pour retirer les puces de sa tête. Il aurait voulu demander à Carter de lui décrire les moindres faits et gestes du médecin mais ne le fit pas, sachant pertinemment qu’il l’aurait regretté et que ça n’allait pas l’aider. Heureusement, en fonction des endroits sur lesquels il travaillait, le psychiatre l’occupa avec divers tests et des tentatives d’humour pas toujours réussies. Mais Eugène notait les efforts qu’il faisait pour le rassurer et il faisait de même pour maintenir les souvenirs au loin. Chaque puce qui tombait dans le plateau en métal résonnait aussi fort à ses oreilles que les obus sur la plage du débarquement. Ses amis, Joy, Fanella… étaient-ils fiers de lui ?

— Elles sont toujours actives… y’a même une lumière qui clignote.

— Qu’est-ce que tu voudras faire avec Eugène ? Les piétiner ? Les brûler ?

Du coin de l’œil, Eugène adressa un regard haineux au plateau. Ses bras étaient cramponnés depuis une bonne vingtaine de minutes aux accoudoirs du siège, si forts qu’ils étaient blancs et qu’il ne les sentait même plus. Le temps avait fait son œuvre sur les petites pièces de métal autant que sur lui, elles semblaient comme neuves. Il ne put pas les regarder bien longtemps sans être pris de haut le cœur à l’idée que ces corps étrangers se soient retrouvés dans sa tête toutes ces années et lui aient fait tellement de mal.

— Sauter dessus à pied joints ce serait pas mal, siffla-t-il entre ses dents serrées, le souffle toujours court. Mais je ne peux pas encore marcher. Un marteau fera l’affaire. Un gros marteau. Je taperai dessus de toutes mes forces.

Il voulait les réduire en morceau de ses propres mains. Les renvoyer au néant à l’état de poussière. Qu’elles ne puissent plus jamais avoir d’emprises sur lui, elles et leur lumière terrifiante. Mandalini commença à le recoudre et il sembla à Eugène que l’opération avait à la fois duré des heures et un temps incroyablement court. Il ne semblait pas avoir gardé de séquelles non plus, hormis la perte de ses cheveux. Il supplia néanmoins lorsqu’on lui demanda s’il voulait un calmant de lui donner quelque chose de suffisamment fort pour que cela fasse effet. Même si l’opération s’était bien déroulée, il se savait capable d’hurler à la mort pendant des heures aux prises avec ses anciens souvenirs dès lors qu’on le laisserait seul.

Eugène était littéralement épuisé de ses nombreuses nuits sans trouver de réel sommeil, de l’opération, de l’angoisse profonde qui avait tendu son corps entier. Malgré le calmant il n’eut l’impression que partielle de se détendre. Son esprit le laissait vaguement en paix, sédaté et confus mais son corps était incapable de trouver le repos. Il n’avait pas mal à la tête mais les bandages qu’il sentait contre sa peau qui tirait un peu restaient les témoins de ce qui venait de lui arriver. Plusieurs fois, il se retrouva en train de toucher les pansements, d’essayer distraitement de les retirer comme à l’époque, avant de se reprendre, furieux et honteux contre lui-même.

Il ne pouvait pas y couper, quand bien même les journées suivantes furent pas mal occupées. Il avait fini par prendre le rythme des infirmières qui venaient le matin, des visites tant attendues de Fanella et il était content de voir le kiné pour enfin progresser. Là où, une centaine d’années plus tôt, la douleur l’aurait fait se dégonfler, aujourd’hui il acceptait les exercices sans se plaindre, toujours avec ce délicat espoir de pouvoir marcher, serrer son amie dans ses bras, refaire tout comme avant, tout en étant plus libre qu’il ne l’avait jamais été. Et finalement, l’opération commençait à cesser d’être la porte ouverte vers d’autres cauchemars pour lui montrer la voie de la guérison. Une voie où il n’aurait plus mal, plus à se sentir menacé de l’intérieur. Une voie où il pouvait reprendre le contrôle sur qui il était.

Les soirs où Carter venait s’entretenir avec lui avaient été source d’appréhension aussi mais finalement, malgré la douleur qu’Eugène ressentait à chaque mot qu’il devait sortir, malgré l’épuisement à la fin des séances, il savait que tout comme le reste, c’était pour le faire progresser. Parfois il éteignait la machine tampon, parfois il la laissait allumer. Même s’il en avait l’autorisation, il ne commentait les pensées de Carter à son sujet que lorsqu’il jugeait que c’était vraiment nécessaire. La plupart du temps, il faisait comme avec Fanella ; il était conscient de leur existence mais n’en tenait pas compte. Cela l’aidait néanmoins à mieux comprendre son comportement et son cheminement de pensée, que d’avoir accès au sien. Il avait bien vite compris cependant que le plus dur était devant lui. Il aurait aimé y couper ; parler de ses pensées négatives, principalement tournées en ce moment sur ce que son amie scientifique devait bien penser de lui et de son apparence physique misérable, était suffisamment douloureux.

Une semaine passa ainsi, durant laquelle peu à peu, tout le négatif du point de départ se transformait en positif à l’arrivée. Eugène était un peu plus léger, même s’il refusait toujours catégoriquement de se regarder dans un miroir et éteignait la machine tampon dès qu’on venait refaire ses pansements. Tant que les bandages entouraient sa tête, il pouvait s’imaginer quelque chose de mieux que ce qui se trouvait réellement en dessous. Comme si ses cheveux n’avaient jamais disparu. Comme à son habitude, Fanella était venue lui rendre visite ce matin-là. Le visage du médium s’éclaira d’un tendre sourire lorsqu’il vit la montre qu’elle tenait fièrement dans ses mains et à travers ses pensées, tout l’acharnement d’une équipe qui avait veillé à ce que ce projet soit mené à bien.

— Regarde, on a réussi.

Eugène observa le petit dispositif, si habilement dissimulé, avec beaucoup d’émotions. C’était peut-être le plus beau cadeau que Fanella pouvait lui faire, hormis celui de lui avoir donné une seconde vie. Il signait là aussi un retour à la liberté et au contrôle de sa vie. Pour n’importe qui d’autre, ce n’était qu’une belle montre mais pour lui, c’était bien plus que cela. L’argent et le bleu du cadran lui correspondaient parfaitement. Il releva la tête vers son ami, les larmes aux yeux, mais il avait de toute façon la larme facile ces derniers temps.

— C’est l’un des plus beaux cadeaux que tu puisses me faire, Fanella, déclara-t-il avec une joie difficilement contenue. Elle est… elle est magnifique. Merci beaucoup, ça signifie tellement pour moi.

Il l’attrapa d’une main mal assurée, empli de la peur de la casser mais elle semblait résistante. Il la porta ensuite à son cœur avec l’intention de la chérir chaque jour et d’être à jamais reconnaissant envers tous ceux qui avaient participé à sa création. Il pouvait enfin dire adieu à la machine bruyante qui avait été son plus fidèle compagnon de chevet ces derniers temps.
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Fanella Ozark
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Lun 8 Aoû - 22:49
Après l’opération, Carter avait proposé à Eugène d’écraser ses anciennes puces au marteau comme il l’avait demandé. Cela avait fait l’objet d’une séance particulière durant laquelle il avait été invité à s’exprimer sur ce que cela lui faisait vivre. Le médecin avait été rassuré de le voir faire preuve de tant de combativité et espérait que cela l’aiderait à réaliser que le contrôle qui s’exerçait sur lui autrefois appartenait bien au passé aujourd’hui. Eugène se rétablissait juste un peu plus vite qu’il l’avait estimé. Bientôt il n’aurait presque plus besoin des infirmières pour assurer la gestion de son quotidien, même si ses jambes posaient toujours problème actuellement. Mandalini était reparti au Mali opérer des épileptiques après le succès de leur mission. Carter l’avait franchement remercié pour son aide, sans cela, nulle doute qu’il n’y serait pas parvenu sans mettre en danger la sécurité de son patient.

De son côté dès qu’elle avait pu, Fanella avait montré à Eugène la montre qu’elle et son équipe avait conçue avec beaucoup de joie. La réponse d’Eugène fut à la hauteur de ses attentes.

— C’est l’un des plus beaux cadeaux que tu puisses me faire, Fanella, déclara-t-il joyeusement. Elle est… elle est magnifique. Merci beaucoup, ça signifie tellement pour moi.

Il la serra contre son coeur, sans même songer à la mettre encore. La jeune chercheuse lui sourit d’autant plus. Sa joie était contagieuse. Elle était fière de l’accomplissement de son équipe.

— En fait le cadran est comme un interrupteur. Pour l’enclencher, il suffit d’appuyer dessus et il s’éclaire légèrement et quand tu veux l’arrêter, il suffit de recommencer. C’est tout simple.

Elle eut un petit rire nerveux qu’elle s’expliqua mal et se retint à grand peine de battre des mains avant de reprendre.

— Normalement la portée est de quelques mètres je pense que ça devrait suffire non ?

Fanella essaya de modérer son enthousiasme, parce qu’elle n’était pas sûre qu’il accède à sa demande suivante, malgré le cadeau qu’elle venait de lui faire. Pourtant, elle avait vraiment envie que les choses évoluent positivement. Alors elle devait se lancer. Elle reprit donc, plus timidement.

— Aussi… je pensais… Peut-être on pourrait sortir aujourd’hui non ? Je pourrais pousser ton fauteuil si tu veux ?


Elle essaya de ne pas trop le supplier du regard. Elle avait attendu ce moment avec une impatience qu’elle s’expliquait mal. De temps à autres lorsqu’elle levait le nez de son travail, il lui arrivait d’avoir des rêveries diurnes à ce sujet. Eugène et elle en ville, au bord du lac, ou au restaurant. De temps à autre, elle remarquait la courbure de son épaule ou celle de son visage, mais le plus souvent, elle chassait ce genre de pensée en sa présence. Tout cela commençait à prendre trop de place dans son esprit peut-être, mais elle ne détestait pas ça.

Au moins, maintenant allait-elle pouvoir se concentrer sur les études de la mort telles qu'elle les avaient conçues au départ.
Fanella Ozark
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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Mar 9 Aoû - 10:43
Une fois l’opération terminée, Mandalini était reparti aussi vite qu’il était venu. Eugène rangea dans un coin de sa tête l’idée de lui trouver et de lui envoyer un cadeau pour le remercier, si un jour il parvenait à décrocher un travail et suffisamment d’argent pour être autonome. Cet aspect là lui faisait un peu peur ; mis à part la guerre et l’espionnage, il se sentait bon à rien. Il n’avait jamais été à l’école, avait juste appris à lire, écrire et à calculer de manière basique, sur le tas. Aucun diplôme à mettre sur un CV. La seule chose qu’il savait faire au fond, c’était mettre à nu l’esprit des gens. Peut-être que faire le ménage ne serait pas trop compliqué, cela dit. Dans tout les cas, il fallait d’abord réapprendre à se déplacer avant de passer à l’étape suivante.

Carter était venu à l’une de leurs séances avec un marteau et le médium avait pu mettre des actes derrière ses paroles et réduire à l’état de rien les puces qui avaient partagé et fait un enfer de son quotidien pendant des années. Il savait que de vieilles pièces de métal n’allaient pas souffrir comme lui ni prendre conscience de ce qu’elles avaient fait, ainsi martelées, mais il en retira une satisfaction et un regain de contrôle sur son corps et sa vie qui lui donnèrent un regain d’énergie pour vraiment aller de l’avant et réapprendre à vivre par lui-même. Cette séance avait donc été bien plus positive à ces yeux que toutes celles où il devait exprimer les pensées horribles qu’il s’adressait à lui-même. Les dire à voix hautes avait au moins le don de lui faire comprendre qu’elles étaient dures, violentes et loin de la réalité, même pour lui. Globalement, il était donc heureux que Carter l’accompagne sur ce chemin et l’aide à réaliser toutes ces choses.

Mais bien sûr, ce qu’il attendait chaque jour avec le plus d’impatience, c’était la visite de Fanella. Combien de fois regardait-il l’heure tourner avant qu’elle n’arrive ? Il s’agitait dans son lit à chaque fois pour avoir la certitude d’être le plus présentable possible, malgré l’horrible tête qu’il devait toujours avoir, pleine de bandages et sans cheveux. Il prenait les compléments et un petit duvet semblait revenir, du moins il l’espérait car il n’osait pas toucher de peur de se perdre et de tout arracher. Il ne voulait pas qu’on se fâche contre lui. Heureusement, grâce au cadeau de son amie, une belle montre qui dissimulait une machine tampon miniature, ce n’était plus son apparence qui occupait ses pensées. Il était très touché et avait serré l’objet contre lui avec beaucoup d’émotions. Fanella elle-même semblait très émue et fière d’elle. Encore une fois, elle pouvait l’être.

— En fait le cadran est comme un interrupteur. Pour l’enclencher, il suffit d’appuyer dessus et il s’éclaire légèrement et quand tu veux l’arrêter, il suffit de recommencer. C’est tout simple. Normalement la portée est de quelques mètres je pense que ça devrait suffire non ?

Eugène enfila précautionneusement la montre avec ses mains qui retrouvaient peu à peu leur habileté et fit tourner son poignet pour l’observer sous toutes ses coutures. Il appuya dessus et l’effet se fit effectivement sentir puisqu’il se retrouva seul avec lui-même jusqu’à ce qu’il l’éteigne de la même manière. Il se demanda comment un dispositif tel que la machine qui avait partagé son chevet depuis le début pouvait rentrer dans un objet aussi beau, petit et discret. Il était fasciné. Son poignet respirait la classe au point que s’en était presque étrange.

— C’est parfait, déclara-t-il avec un grand sourire. Mais… est ce qu’il faut la recharger aussi ?

Une question qui lui sembla pertinente puisque la grosse machine était toujours branchée. Il ne voulait pas faire d’impair et savoir s’en servir seul jusqu’au bout. Privé des pensées de Fanella lors du test de la montre, il n’avait pas pu intercepter ce qui se tramait à l’intérieur de son esprit bouillonnant. Sa proposition fit s’emballer son cœur bien plus que ce qu’il aurait voulu.

— Aussi… je pensais… Peut-être on pourrait sortir aujourd’hui non ? Je pourrais pousser ton fauteuil si tu veux ?

Il voyait bien à présent qu’elle en avait très envie. De pouvoir profiter de ce moment, rien qu’avec lui. L’idée de se retrouver face au monde extérieur cloué et dépendant d’un fauteuil, dans son état, lui sembla à la fois excitante et terrifiante. Il avait laissé tomber l’idée qu’on le reconnaisse mais on allait forcément s’arrêter sur son passage, se poser des questions. Les pensées de Fanella l’aidèrent heureusement à ne pas céder à la panique. Elle pensait à lui au moins autant qu’il pensait à elle, dans ce monde qui les attendait, là dehors. Malgré l’envie, une hésitation subsistait et il fit de son mieux pour la formuler clairement.

— Tu crois que je peux sortir… avec la tête que j’ai ? Je me trouve affreux, ça me gêne beaucoup.

Mettre une perruque ou un carton sur la tête lui paraissait encore pire. Peut-être que Fanella avait un bonnet à lui prêter, s’il n’y avait pas de contre-indication après son opération. Il avait toujours été très frileux de toute façon, adepte des gros pulls en laine réconfortants et des chaussettes dans le lit. Il se reprit néanmoins car il ne voulait pas que son amie pense qu’il refusait d’aller dehors.

— J’aimerai beaucoup aller faire un tour, je n'attends que ça depuis que je suis là, mais il faudrait cacher un peu tout ça… et où est-ce que tu voudrais aller ?

Savoir sa destination l’aiderait à se préparer. Il réagirait différemment s’il s’agissait d’aller boire un café où juste d’aller se promener sur la passerelle. Concernant le fauteuil, il pouvait l’aider un petit peu sans que cela ne se remarque. Une partie de ses pensées lui disait qu’une fois dehors, contrairement à ce qu’il croyait, il ferait plus facilement abstraction du regard des autres pour se concentrer dans la globalité sur ce qui l’entourait.
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Fanella Ozark
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Jeu 11 Aoû - 10:19
Fanella venait d’offrir la montre à Eugène. Il venait de l’enfiler à son poignet et elle se félicita d’avoir estimé sa taille correctement.  Son sourire ne faisait que s’élargir à mesure qu’elle voyait le sien. L’importance qu’il accordait à ce geste lui faisait sentir à quel point ils avaient été rares dans son existence. Elle songea avec un brin de culpabilité à sa chambre remplie de peluches et de livres.

— C’est parfait, sourit-il. Mais… est-ce qu’il faut la recharger aussi ?

C’était un des aspects qui lui avait donné du fil à retordre. Mais finalement quelqu’un de l’équipe avait trouvé une solution, la même que celle de certaines montres plus anciennes avant l’ère du numérique.

— Non, en fait elle tire de l’énergie des micros mouvements. Le seul truc c’est si tu ne la portes pas de plusieurs jours, elle risque d’être déchargée et donc il faudra un peu la secouer, mais normalement, elle est parfaitement autonome.

Fanella n’était pas peu fière de son accomplissement. Cet objet était un véritable bijoux de technologie. Continuant sur sa lancée optimiste elle avait osé lui proposer d’aller dehors tout en essayant de modérer son enthousiasme. Elle avait même proposer de pousser son fauteuil. Elle songea que peut-être il ne voudrait pas mettre le nez dehors avant d’être sur ses deux pieds ? Mais finalement le problème pour lui était ailleurs.

— Tu crois que je peux sortir… avec la tête que j’ai ? Je me trouve affreux, ça me gêne beaucoup.

Elle ne s’attendait pas vraiment à ça. Il ne lui était jamais venu à l’esprit de juger l’apparence d’Eugène suite à son opération. Brusquement, ses rêveries diurnes lui revinrent en mémoire et elle considéra qu’au contraire son physique lui plaisait plutôt. Cela était d’autant plus déstabilisant que d’ordinaire elle n’avait pas ce genre de considérations. Elle chassa cette pensée aussi vite qu’elle put en regardant ailleurs l’espace d’une seconde et pria pour qu’il s’en tienne à ce qu’ils avaient décidé, s’en tenir à ce qu’elle lui disait. Le temps qu’elle se reprenne, il avait reprit la parole.

— J’aimerai beaucoup aller faire un tour, je n'attends que ça depuis que je suis là, mais il faudrait cacher un peu tout ça… et où est-ce que tu voudrais aller ?

Les joues encore un peu roses elle s’autorisa à prendre la parole de nouveau.

— Tu n’es pas affreux Eugène tu es blessé ça n’a rien à voir. Mais je dois pouvoir te trouver quelque chose si tu veux. De toute façon, il fait 3 dehors aujourd’hui je crois. On pourrait aller voir le lac, depuis la passerelle, qu’en penses-tu ? Je vais aller travailler mais ce soir en revenant je te ramène tout ce qu’il faut ?

Bientôt il serait temps de penser à ce que Eugène deviendrait après son séjour au laboratoire. Dès qu’il tiendrait à peu près sur ses jambes, Carter voudrait sûrement le faire sortir pour favoriser son retour à l’autonomie. Elle l’hébergerait avec plaisir évidemment mais il faudrait un jour ou l’autre qu’il puisse faire sa vie à lui. Restait la question des papiers d’identité. L’équipe de Spencer planchait actuellement sur la question, mais peut-être était-il encore trop tôt pour en discuter.
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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Jeu 11 Aoû - 11:09
Eugène avait demandé à Fanella s’il devait recharger la belle montre qu’il arborait maintenant au poignet et qui allait l’aider à gagner encore en contrôle sur ses pouvoirs. Elle lui avait expliqué que les micros mouvements de l’appareil suffisaient à la recharger et il trouva cela absolument fantastique. Qu’un si petit objet puisse faire autant d’effet et n’ait pas besoin d’une énorme quantité de courant pour fonctionner. La scientifique et son équipe avaient dû s’arracher les cheveux et redoubler d’ingéniosité rien que pour lui. Le médium allait certainement la porter même la nuit. Il aurait trop peur de la perdre sinon.

Était question ensuite d’une sortie, d’un petit tour à l’extérieur. Fanella semblait penser qu’il aurait préféré attendre de marcher pour sortir et c’était effectivement une excuse qui lui avait traversé l’esprit pour rester caché au fond du labo. Mais Eugène en avait un peu assez d’avoir peur et de se couper de l’extérieur. Il voulait sentir le vent sur sa peau, écouter le bruit de la ville, expérimenter de nouvelles choses. Ça n’avait pas été le cas depuis le voyage retour du Kazakhstan et il se demandait parfois encore, au milieu de la nuit, s’il était réellement là. Marcher était donc le cadet de ses soucis et de ses excuses pour sortir. Présentement, sa tête lui posait bien davantage problème et il avait tenté de l’expliquer à son amie, un brin honteux de devoir attirer l’attention sur cet aspect de son physique dont il se complaisait à nier l’existence et le changement.

Fanella sembla d’ailleurs surprise de constater à quel point son apparence pouvait le freiner. Il pensait qu’elle ne voyait que ça depuis le début mais finalement, il s’était peut-être encore une fois trompé. C’était même tout l’inverse lorsque ses pensées déferlèrent en lui et le rouge leur monta aux joues en même temps. La jeune femme détourna le regard et il fit de même l’espace d’un instant, regardant avec beaucoup d’intérêt ses petits pieds qui formaient deux bosses sous les draps. Un peu plus et il aurait appuyé sur la montre. Il regrettait un peu de ne pouvoir lui laisser le secret de ses pensées mais en même temps, qui aurait pu prédire celles qui l’habitaient en ce moment. Certainement pas lui qui n’avait jamais compris ce qu’on pouvait lui trouver d’attirant ou de séduisant. Dans tous les cas, là n’était pas la question et il ne voulait pas rebondir sur quelque chose qu’il n’était pas censé avoir entendu. Il continua leur conversation comme s’il ne s’était rien passé d’autre.

— Tu n’es pas affreux Eugène tu es blessé ça n’a rien à voir. Mais je dois pouvoir te trouver quelque chose si tu veux. De toute façon, il fait 3 dehors aujourd’hui je crois. On pourrait aller voir le lac, depuis la passerelle, qu’en penses-tu ? Je vais aller travailler mais ce soir en revenant je te ramène tout ce qu’il faut ?

Les basses températures, il avait l’habitude en Russie mais cela datait d’avant sa mort. Il ne savait pas comment son corps allait réagir au froid ni ce qu’il allait ressentir, il en avait perdu l’habitude. Un bon bonnet et une grosse veste devraient faire l’affaire cela dit. Il rêva durant quelques secondes de la passerelle et du lac et de leur dernière discussion à cet endroit. Une vraie sortie, entre deux êtres vivants, feraient peut-être oublier cet ancien déboire pour y inscrire des souvenirs plus doux. Ses paroles et ses pensées l’avaient tout de même un peu consolé sur son apparence et il releva la tête pour lui sourire tendrement.

— Tu as raison oui et j’essaye d’en discuter avec Carter justement… Mes cheveux vont repousser c’est juste difficile de devoir attendre.

Il ne voulait pas lui faire honte mais ces pensées ridicules faisaient peut-être bien partie de toutes celles qu’il tournait toujours contre lui. Il ne voulait pas qu’elles le freinent dans ses idées et ses initiatives, qu’elles l’empêchent de profiter. Eugène allait donc laisser un peu sa tête de côté pour se concentrer sur toutes ces pensées qui lui faisaient plaisir et le réchauffaient de l’intérieur.

— Je pense que j’adore cette idée et j’aimerai beaucoup retourner sur la passerelle avec toi. J’attends depuis si longtemps qu’on puisse faire quelque chose rien que tous les deux.

L’attente risquait d’être longue jusqu’à ce qu’elle revienne mais il prendrait son mal en patience. Il aurait aimé lui faire la surprise de marcher mais ses jambes semblaient toujours récalcitrantes à porter son poids. Briser la routine ne pouvait lui faire que du bien et il languissait souvent de pouvoir sortir de son lit d’hôpital.
Eugène (The Sorrow)
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Fanella Ozark
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Sam 13 Aoû - 19:15
Fanella était toujours étonnée de l’importance qu’Eugène accordait à son apparence et surtout de l’entendre employer des termes tels que « affreux » pour se décrire. Elle-même ne lui trouvait rien d’horrible bien au contraire, mais heureusement Eugène avait laissé cette pensée là où elle était sensée être  : dans le secret de son esprit. Ils avaient donc détourner le regard, gênés, avant de reprendre le cours de cette discussion là où ils l’avaient laissée. La jeune femme l’avait rassuré comme elle avait pu sur son apparence et malgré tout proposé de lui ramener de quoi se couvrir la tête. De toute façon il en aurait besoin, après avoir passé tout ce temps enfermé, son corps risquait d’avoir quelques difficultés à s’adapter aux températures glaciales de Salt Lake City en hivers. Peut-être était-ce une des raisons qui faisaient qu’elle dormait si souvent au laboratoire  : pour rentrer chez elle, il fallait affronter une nuit si froide que ses doigts devenaient bleus chaque fois.

— Tu as raison oui et j’essaye d’en discuter avec Carter justement… Mes cheveux vont repousser c’est juste difficile de devoir attendre, expliqua Eugène au sujet de son apparence.

Si quelqu’un pouvait aider Eugène à surmonter ça, c’était bien Carter. Elle espérait qu’il parviendrait à se défaire de ces idées obsédantes dans sa tête.

— Je comprends… ça prendra du temps mais tu vas y arriver, le pire est déjà derrière toi.

Du moins, elle l’espérait. Elle-même vivait toujours avec ce sentiment dans un coin de sa tête qu’une catastrophe allait advenir et dormait plus mal que jamais. Peut-être était-elle un peu de mauvaise foie ? À quel point est-ce que c’était difficile de se construire une vie lorsqu’on en avait jamais fait l’expérience ? Elle n’en avait pas la moindre idée. Elle espéra là encore qu’Eugène n’avait pas capté toute ces pensées pas forcément encourageantes, mais évidemment elle connaissait déjà la réponse.

— Je pense que j’adore cette idée, reprit Eugène pendant qu’à nouveau elle essayait de collecter ses pensées, et j’aimerai beaucoup retourner sur la passerelle avec toi. J’attends depuis si longtemps qu’on puisse faire quelque chose rien que tous les deux.

La fin de phrase d’Eugène fit monter le rouge aux joues de la jeune femme jusqu’aux oreilles. À nouveau elle détourna les yeux. Elle décida qu’il était temps de s’éclipser avant que ses pensées ne se mettent à voler en tout sens. Aussi, elle s’enfuit presque après avoir dit très vite et d’une voix déraisonnablement aiguë.

— Très bien, alors à tout à l’heure  !

Sans lui laisser le temps de répondre quoique ce soit, elle s’éclipsa et ferma brutalement la porte. Une fois seule, elle s’adossa au mur du couloir. «  rien que tous les deux ». Ces quelques mots avaient soudain déclenché en elle tout un torrent de pensées totalement incontrôlables. Qu’est-ce que ça voulait dire « rien que tous les deux ? » Et si les rêveries diurnes qui l’envahissaient depuis quelques temps pouvaient avoir un fond de réalité ? Et si, pour de vrai, Eugène et elle se retrouvaient dans une relation disons romantique ? Que ferait-elle alors ? Elle devait bien admettre que l’idée lui plaisait et que c’était d’ailleurs pour cela qu’elle suscitait autant de panique en elle. Au fond l’émotion qui la dominait était la joie mais ce soir ? Que ferait-elle ? Comment réussirait-elle à maîtriser ses pensées ? Elle espéra qu’Eugène allume sa montre mais en réalité, elle doutait qu’il le fasse.

Durant la suite de la journée, elle éprouva de la difficulté à se concentrer, pourtant il lui restait temps de données à compulser et il fallait rédiger quelques papiers pour garder trace à tout ce travail colossale. Elle se maudissait de se comporter comme une adolescente prépubère, il y avait plus important actuellement. Avec tout ça, elle avait oublié de prévenir sa mère qu’elle était bien rentrée ce qu’elle finit par faire. Alors que la journée se terminait, elle sortit dans le froid, emmitouflée dans son gros manteau pour trouver un bonnet et une bonne écharpe à Eugène.

Lorsqu’elle frappa à sa porte à nouveau Fanella avait à peu près reprit le contrôle de son esprit. Sa préoccupation était plutôt de savoir si Eugène n’aurait pas trop peur dehors dans la nuit qui tombait pour sa première sortie, ni trop froid. En somme, elle ressentait finalement plutôt un fond d’anxiété alors que ses pensées amoureuses étaient retournés se perdre dans l’irréalité.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 14 Aoû - 15:30
Eugène avait tenu à dire la vérité à Fanella, non sans une certaine maladresse. Il attendait effectivement depuis même avant sa résurrection de pouvoir passer un moment avec elle en ville en sentant sa main dans la sienne et le sol sous ses pieds, bien vivant. Pour le sol, il devrait attendre encore un peu puisque ses jambes n’étaient pas encore assez fortes pour le porter mais il suivait assidument ses séances de kinésithérapie avec cet objectif en tête. Par contre, il ne voulait pas cacher que le laboratoire et ses murs lui pesaient de plus en plus et qu’il se languissait de l’extérieur qu’il avait entraperçu en voiture et d’un moment tranquille seul à seul avec la jeune femme. Il savait de quoi tout cela avait l’air. Et surtout Eugène ne voulait pas réitérer sa méprise de la dernière fois, où il était revenu sur ses propos, bien plus maladroits. Il avait bien vu que cela avait fait du mal à Fanella alors il n’était pas revenu sur ceux qui venaient de sortir de sa bouche.

— Très bien, alors à tout à l’heure !

La scientifique se sauva, rouge comme une pivoine, pensant désespérément échapper au radar mental d’Eugène si la porte se refermait derrière elle. Malheureusement il n’en fut rien et Eugène perçut tout de son trouble et de ses pensées. Il n’était pas surpris de la voir cheminer vers un aspect plus romantique de leur relation, après tout, cela lui arrivait aussi. Bien plus souvent qu’il n’osait l’admettre pour son propre équilibre. Car au fond, même si l’idée qu’ils aient tout deux des sentiments l’un pour l’autre faisait battre son cœur, une peine lourde à porter pesait sur ses épaules. Une forme de trahison sale, mélangée à la peur de voir le passé se répéter. Il venait à peine de revenir, son alliance et celle de Joy se trouvaient à deux pas dans ses affaires et son cœur le dirigeait déjà dans les bras d’une autre. Même si elle était morte, même si elle ne reviendrait pas, la laisser derrière lui sans plus de formalités lui donnait l’impression d’être un monstre irrespectueux. Il aurait aimé faire les choses dans l’ordre, lui dire un dernier adieu symbolique pour s’autoriser à passer à autre chose. Sauf qu’il était dans l’incapacité totale, autant physiquement que financièrement, de mener à bien cette entreprise.

Et Eugène avait aussi peur de condamner Fanella en jetant ainsi son dévolu sur elle. Pour l’instant, il était en sécurité mais qui pouvait garantir que ce soit le cas dans le futur ? Il ne voulait pas revivre l’enfer de son passé ni le faire peser sur la jeune femme ou la mettre en danger. Une vie presque normale se tenait là, à portée, prête à être saisie mais une partie de lui continuait de penser qu’il n’y avait pas droit, ou du moins que c’était trop beau pour être vrai. Malgré sa montre et les années écoulées, quelque chose allait forcément finir par lui tomber dessus. Et en même temps, la scientifique était si brillamment intelligente qu’elle avait dû de son côté réfléchir à tout cela aussi. Si elle parvenait à se l’imaginer de manière romantique, cela voulait peut-être dire que c’était un risque qu’elle était prête à courir pour qu’ils soient heureux, tous les deux. Au fond, il ne s’agissait que de cela.

Eugène se prenait beaucoup trop la tête et il mangea peu ce jour-là, en attendant le retour de Fanella et l’heure fatidique de sa première sortie. Il n’avait pas vraiment le luxe de pouvoir s’occuper autrement pour éviter de réfléchir sur ces sujets bien trop complexes. Il essaye de se reposer mais même les rêves confus qui l’habitèrent furent quelque peu désagréables. Il se rassura du mieux qu’il pouvait en regardant la montre et en se disant que de toute façon, il n’allait clairement pas la confronter sur ses pensées. Tout ce qu’il voulait, c’était passer un bon moment. Ils avaient encore du temps pour réfléchir à tout cela, pour faire les choses bien, à leur rythme. Il ne voulait pas braquer Fanella, ni lui faire peur. Lorsqu’elle revint le voir, elle semblait avoir repris le contrôle de ses pensées, focalisée sur la sortie, et il avait fait de même avec une pointe de soulagement.

— Bonsoir Fanella, la salua-t-il avec un sourire. Tu vas bien depuis tout à l’heure ? On dirait qu'il fait froid dehors.

Avec tout cela, au moins, il n’avait pas vraiment eu l’opportunité de s’inquiéter de sortir des murs. L’excitation était équivalente à l’appréhension. Il lisait dans son esprit qu’il faisait froid et le bonnet ainsi que l’écharpe qu’elle tenait dans ses bras lui parurent soudain très réconfortants. En soi, même le froid lui ferait du bien cette fois, il en était convaincu. Il était prêt à déterrer des trésors de courage et de motivation juste pour le plaisir de retrouver cette sensation et respirer l’air frais du soir.

— Merci pour le bonnet et l’écharpe… j’aurais aimé dire que je te rembourserai mais je ne sais pas quand ce sera possible.

Elle s'était donné de la peine pour aller les lui acheter après tout et encore une fois, chaque cadeau qu'elle lui faisait le touchait beaucoup. La jeune femme l’aida à les enfiler et après quelques minutes, Eugène fut lui aussi emmitouflé dans un gros manteau. Il était content car le bonnet cachait assez bien sa tête et l’écharpe était douce. Il pouvait y enfoncer son nez sans trop de difficulté si le froid venait à le picoter un peu trop fortement. On aurait pu penser qu’il allait mourir de chaud, ce à quoi le médium aurait répondu qu’on n’avait jamais trop chaud lorsqu’on était sans cesse harcelé par des fantômes. Les quelques spectres qui le suivaient encore avaient bien compris qu’ils ne devaient pas faire de vagues car la montre marchait tout aussi bien que la grosse machine tampon. Il préférait la laisser éteinte pour sortir pour l’instant mais si des pensées devaient à nouveau leur échapper à tout les deux, il était prêt à l’allumer si c’était nécessaire.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Jeu 18 Aoû - 17:22
Lorsque Fanella poussa les portes de la chambre d’Eugène, ses joues étaient encore rosies par le froid. Finalement en plus du bonnet elle avait pris une grosse écharpe bien chaude dans l’espoir que cela serait suffisant. Le froid ne serait pas la seule difficulté qu’ils auraient à affronter cependant et loin de ses préoccupations du matin, la jeune femme se sentait surtout anxieuse à l’idée de ce qui allait suivre. Elle essaya de ne pas l’imaginer faire marche arrière juste avant que les portes battantes ne s’ouvrent sur lui. À sa place, elle serait plutôt terrorisée mais il restait à espérer qu’il était plus courageux qu’elle. Que faisait-elle, à lui imposer des pensées tout sauf encourageantes ? Il l’accueillit avec un grand sourire et cela suffit à lui rendre la conviction que les choses pouvaient aussi très bien se passer. Elle lui répondit du mieux qu’elle put.

— Bonsoir Fanella, dit-il chaleureusement. Tu vas bien depuis tout à l’heure ? On dirait qu'il fait froid dehors.

En effet, elle sentait toujours ses joues, son nez et le bout de ses doigts la picoter.

— Oui, plutôt.

Elle chassa le petit rire qui montait de sa gorge. Pourquoi fallait-il toujours qu’elle en fasse trop ?

— Merci pour le bonnet et l’écharpe… j’aurais aimé dire que je te rembourserai mais je ne sais pas quand ce sera possible.

L’idée n’avait pas seulement traversé l’esprit de Fanella. La jeune femme gagnait très bien sa vie à la tête du laboratoire. Beaucoup plus de gens qu’on pourrait penser étaient prêts à financer des études sur la mort avec toutes sortes de motivations personnelles ou financières ou par simple curiosité intellectuelle.  Comme elle passait la plupart de son temps à travailler, elle ne dépensait pas grand chose, sinon le loyer, de son 50m2 avec vu sur lac et quelques yaourts ou repas touts prêts qu’elle mangeait à son bureau. Sans compter que sa mère, qui, pour une raison inconnue, éprouvait toujours le besoin de lui verser 2000 dollars par mois, le minimum pour vivre selon elle lorsque Fanella était encore étudiante. Chaque fois qu’elle l’avait au téléphone sa banquière s’évertuait à lui expliquer que ça n’était pas une bonne idée de conserver tout cet argent sur son compte courant, chaque fois, la jeune femme lui répondrait qu’elle allait s’en occuper… et oubliait la seconde d’après.  Autant la montre était un cadeau dans son esprit parce qu’elle y avait consacré du temps et de l’énergie, autant l’argent dépensé pour acheter ces quelques petites choses ne représentait rien pour elle. Voir Eugène leur accorder autant d’importance lui faisait à nouveau prendre conscience d’à quel point il avait été privé de tout. À côté de lui, elle avait été si pourrie gâtée.

Elle l’aida à enfiler l’ensemble. Comme elle passait l’écharpe autour de son cou son odeur parvint jusqu’à elle. Accidentellement, sa joue effleura la sienne. Heureusement, elle se reprit juste avant la catastrophe. Elle se redressa avec un grand sourire.

— Tu n’as pas à me rembourser Eugène. Je comprends que tu as envie de devenir indépendant mais une chose à la fois… hein ? En attendant si tu as besoin de quelque chose, contente-toi de me demander d’accord ? Je t’ai ramené, c’est à moi d’assumer pour le moment, non ?


La première des choses serait déjà de franchir les portes du laboratoire. Après une longue route l’attendait dont personne savait où il la mènerait. Il faudrait ruser pour qu’il soit libre de choisir. Elle attrapa le fauteuil pour l’amener près du lit et puis elle se demanda comment elle allait bien pouvoir faire. C’est le moment que choisit l’infirmière pour entrer.

— Oh on dirait que vous avez besoin de moi, chantonna-t-elle.

Fanella fut quelques peu mal à l’aise en la regardant manipuler Eugène qui peinait avec ses jambes encore trop faibles. Mais cela aurait été pire si elle avait du essayer de le faire elle-même avec toute sa maladresse. Elle aurait eu au moins une chance sur deux de le faire tomber. Un instant elle redouta sans savoir pourquoi que la jeune femme veuille les accompagner mais il n’en fut rien. Aussi bientôt la jeune chercheuse se retrouva à pousser Eugène dans les couloirs. Beaucoup n’étaient pas au courant de la situation mais ils se disaient le plus souvent qu’ici, mieux valait éviter de poser des questions indiscrètes si l’on avait pas l’accréditation pour avoir les réponses. Ou pire, poser des questions sur la vie personnelle de Fanella, voilà qui ne se terminait jamais bien.

Le hall d’entrée lui sembla plus vaste qu’habituellement, de même que les grandes portes automatiques un peu plus hautes. D’ici, on entendait déjà le vent. L’anxiété gagna la jeune femme sans qu’elle s’explique pourquoi.

— Tu es prêt ? Lui demanda-t-elle avant de franchir les quelques mètres qui les séparaient de l’entrée.

Tout irait bien. Carter lui avait expliqué, l’anxiété avait avoir avec avant pas avec après. Sans qu’elle puisse l’empêcher, le coup de feu résonna en arrière fond de sa tête.
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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Jeu 18 Aoû - 21:01
Eugène appréhendait cette sortie autant pour le fait de se retrouver physiquement à l’extérieur que parce qu'il était vraiment seul avec Fanella. Finalement, lorsqu'il était un fantôme, ces affres avaient semblé plus faciles à gérer. Peut-être parce que personne d'autre à part elle ne pouvait le voir et qu'aujourd'hui, il aurait bon nombre de sensations physiques ou émotionnelles à gérer. Il essaya de se rassurer en se disant que dans le pire des scénarios, les puces avaient disparu et qu'il serait capable d'avoir le réflexe de se défendre, lui et son amie. L'image des portes s'ouvrant devant lui telles que Fanella les imaginait lui fit un peu peur mais il préféra se concentrer sur le bonheur de la retrouver.

Car après tout, avant de commencer cette aventure, il fallait l'habiller un peu. Elle l'aida à enfiler le bonnet en laine tandis qu'il exprimait son envie de la rembourser, même pour un achat aussi futile que celui-là aux yeux de la scientifique qui ne savait que faire de son argent qui s'amassait à la banque. Elle pouvait se permettre tellement plus, un comble pour une jeune fille aussi peu matérialiste. Au moins, il était convaincu qu'elle ne manquerait jamais de rien en termes de confort physique ou qu'elle ne mourrait pas de faim. Emotionnellement parlant, c'était une autre histoire mais ça, ils le savaient plus ou moins tous les deux sans se le dire.

Et puis finalement, une fois sa tête et ses oreilles bien au chaud, Fanella passa à l'écharpe qu'elle entreprit d'enrouler autour de son cou. Eugène la vit s'approcher dangereusement et il s'arrêta un instant de respirer lorsque son cœur rata quelques battements. Leurs visages s'effleurèrent brièvement, encore plus délicatement qu'une caresse. Lui tenir la main semblait déjà incroyablement riche en sensations mais ce simple geste raviva le rose de ses joues. Dans ses pensées qui s'imposaient à lui, il devina que cela n'était nullement intentionnel, même si le contact l'avait troublée aussi. Il espérait qu'elle incomberait ce changement de couleur à sa tenue subitement bien trop chaude pour l'intérieur d'une chambre de laboratoire.

— Tu n’as pas à me rembourser Eugène. Je comprends que tu as envie de devenir indépendant mais une chose à la fois… hein ? En attendant si tu as besoin de quelque chose, contente-toi de me demander d’accord ? Je t’ai ramené, c’est à moi d’assumer pour le moment, non ?

Sa voix et son sourire l'aidèrent à se rappeler du fil de la discussion. Clairement, avec le temps, il parviendrait à passer outre ce petit achat dérisoire et voulait bien le laisser se perdre dans le temps mais Fanella touchait là à quelque chose de plus sensible ; principalement son besoin d'être indépendant oui mais aussi ses principes et ses valeurs. Il acquiesça, acceptant l'idée de procéder étape par étape, mais la seconde partie de sa proposition lui fit détourner le regard.

— Oh je ne sais pas, je n'oserai pas... ça me gêne beaucoup, j'aurais l'impression de faire des caprices, comme un enfant qui demande un jouet. Je ne veux pas passer pour un voleur ou abuser de toi.

Justement elle l'avait ramené et c'était déjà beaucoup. Elle le logeait ici, lui avait permis de recevoir des soins, d'être opéré même. Eugène n'avait rien payé pour tout cela et craignait qu'un jour, la facture lui retombe dessus d'une manière ou d'une autre. Ce dont il était sûr par contre, c'est que ce n'était pas à elle d'assumer ses projets. Il partirait à Washington avec son argent ou bien il n'irait pas et il devrait s'en accommoder. Impossible pour lui de faire peser sur elle pareille demande.

— Je ne sais même pas si je pourrais avoir besoin de quelque chose ou non, en réalité, ajouta-t-il, un peu triste.

Le médium avait été habitué à vivre avec pas moins que rien. A cause de la guerre il avait été amené à s'acheter régulièrement des habits, des lunettes, des produits de première nécessité, mais n'avait jamais vraiment rien possédé. La seule chose qu'il s'était jamais acheté, uniquement par pure envie, avait été une tablette de chocolat et quelques fruits à Noël car cela semblait être une tradition. Comment savoir alors s'il avait besoin ou envie de quelque chose ?

Ses souvenirs furent heureusement interrompus lorsqu'une infirmière vint les voir dans la chambre tandis que Fanella l'aidait à fermer une grosse veste. Elle avait posé le fauteuil roulant juste à côté de lui mais effectivement, à moins de se laisser maladroitement flotter ou tomber dessus, Eugène voyait mal comment il allait pouvoir atterrir avec ses fesses dans son nouveau moyen de locomotion.

— Oh on dirait que vous avez besoin de moi.

— Oui, s'il vous plait, dit-il timidement avec un petit sourire désolé.

Cela ne sembla aucunement déranger la soignante qui n'eut besoin que de quelques secondes pour l'attraper sous les bras et le faire pivoter comme s'il était une poupée de chiffon. Il préférait que ce soit elle qui le fasse plutôt que Fanella, après tout c'était son métier, il n'y avait ni jugement ni arrières pensés et elle ne risquait pas de se faire mal puisqu'elle connaissait les bons gestes. Une fois bien installé, son amie vint dans son dos prendre les commandes du bolide, comme il aimait à l'appeler pour détendre l'atmosphère et calmer son angoisse. Il quitta sa chambre la poitrine palpitante, avec l'impression de plonger dans l'inconnu. Quand bien même, grâce à l'esprit de tous ceux qui travaillaient ici, il connaissait à présent bien ce petit dédale sans avoir eu besoin d'y poser le pied.

Il devait être tard car ils ne croisèrent pas beaucoup de monde. Eugène se tordait les mains discrètement, bien cachées dans les manches de sa veste, en espérant que son inquiétude ne se voie pas trop. Fanella semblait si anxieuse qu'il ne voulait pas la contaminer davantage. Puis la porte se dessina enfin devant lui, le vent claquant à l'extérieur et il eut l'impression d'être au sommet d'une attraction à sensations fortes, arrêté juste avant la vertigineuse descente, le précipice. Une fois cette limite franchie, il n'y aurait plus de retour en arrière. Il sentait son cœur battre à ses tempes, frémissant d'anticipation.

— Tu es prêt ? lui demanda finalement la scientifique.

Eugène sursauta et s'agrippa un peu aux accoudoirs du fauteuil, lorsque la détonation familière résonna dans leurs deux esprits, vestige de souvenirs partagés. Il eut peur comme si elle allait le pousser et qu'il allait dévaler une pente jusqu'à un ravin. Il n'y avait même pas de ceinture de sécurité sur ce truc. Mais le médium savait aussi que ces sensations n'avaient rien à faire là, en temps normal. Qu'elles appartenaient à un passé révolu et qui devait le rester. Sa voix fut claire et déterminée lorsqu'il se reprit.

— Je suis prêt.

Les portes s'ouvrirent sur lui, comme elle l'avait imaginé, le froid s'engouffrant dans l'entrée pour se mêler à la chaleur du chauffage d'intérieur. Eugène sentit son couvre-chef trembloter, l'écharpe frémir sous le vent et il ferma un court instant les yeux pour se protéger de cette caresse glacée qui l'enveloppa. Il les rouvrit en entendant la porte se fermer et prit une première grande inspiration. L'air glacé entra dans ses poumons et la sensation, aussi désagréable qu'enivrante le poussa à réitérer jusqu'à ce que son cœur se calme et qu'il puisse se poser. Il s'amusa à regarder les volutes de buée s'échapper de ses lèvres et se disperser sous le ciel étoilé et nuageux de cette soirée d'hiver.

Les bruits des voitures, le claquement des chaussures sur les pavés, les pensées des passants qui ne s'attardaient sur lui que quelques instants avant de poursuivre leur vie, tout lui paraissait à la fois assourdissant et d'une vague familiarité. Quelques larmes d'émotion réchauffèrent ses joues et il lui fallut de nombreuses secondes pour s'accommoder à cette atmosphère nouvelle. Doucement, il pencha la tête en arrière en espérant capter le regard de Fanella et laissa échapper un petit rire joyeux et étranglé.

— Ça fait un bien fou d'être dehors... On a réussi ! Oh la la, je ne sais même pas quoi dire... C'es tellement... incroyable.

Cela avait semblé une épreuve assez symbolique pour tous les deux. Eugène gardait malgré tout ses doigts proches de la montre au cas où il aurait à l'allumer. La nuit, moins de gens parcouraient les rues mais la portée de son écoute pouvait parfois être assez grande pour devenir trop envahissante. Pour l'instant, il percevait encore les pensées de Fanella et essayait de ne pas trop se concentrer sur celles des autres, de peur de perdre le fil de la conversation.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 21 Aoû - 17:41
Fanella était arrivée avec une écharpe et un bonnet. Pas grand chose pour elle mais beaucoup pour Eugène.  Il avait parlé de la rembourser et la jeune femme avait compris que bientôt il allait avoir toute sorte de besoins. Évidemment, elle acceptait d’y pourvoir. Mais lui, ne l’entendait visiblement pas cette oreille. Elle lui avait expliqué que comme elle l’avait ramené à la vie, c’était de son devoir en quelques sortes de s’assurer qu’il ait tout ce qu’il lui fallait en attendant qu’il puisse se débrouiller seul, mais ça n’était visiblement pas suffisant.

— Oh je ne sais pas, je n'oserai pas... ça me gêne beaucoup, j'aurais l'impression de faire des caprices, comme un enfant qui demande un jouet. Je ne veux pas passer pour un voleur ou abuser de toi.

La jeune femme lâcha un soupire, mesurant encore une fois l’écart entre sa vie, et la sienne. Avec le temps, elle espérait que ce sentiment lui passerait.

— Je ne sais même pas si je pourrais avoir besoin de quelque chose ou non, en réalité, reprit-il.

Le chemin était sans doute encore plus long qu’elle s’imaginait. Il était difficile de se mettre à sa place pour imaginer ce que cela pouvait faire.

— Tu as été habitué à vivre avec très peu de choses c’est pour ça. Mais demander ne fait pas de toi un voleur, ni un enfant qui fait des caprices. Avoir des choses qui t’appartiennent ça te rendra aussi un peu de dignité…


Elle hésita avant d’ajouter.

— Tu devrais demander à Carter ce qu’il en penses.


L’infirmière ne tarda pas à arriver, pour aider Eugène à s’installer sur le fauteuil. Avant que Fanella n’ai eu le temps de se préparer elle se trouvait avec lui devant la grande porte de l’entrée principale du labo. La pensée du coup de feu choisi ce moment là pour s’imposer à son esprit. Elle vit clairement Eugène sursautait. Parfois, elle se demandait pourquoi il ne mettait pas plus souvent la montre tampon en route plutôt que de supporter le cours de ses idées. Elle admira sa capacité à mettre de côté la peur pour oser dire.

— Je suis prêt.

Alors elle le poussa dehors et le froid mordant s’engouffra dans le hall. Les portes se refermèrent derrière eux, les livrant à la nuit encore agitée à cette heure. Sur la route les voitures se succédaient à grande vitesse et quelques piétons se pressaient encore sur les trottoirs emmitouflés jusqu’aux oreilles. Autour d’eux, des enseignes clignotaient, et plus haut encore, les étages des immeubles s’allumaient et s’éteignaient lentement. Encore au dessus, la lune était déjà haute et quelques étoiles visibles là où les nuages n’en barraient pas l’accès. Il était ému mais souriant lorsqu’il pencha la tête en arrière pour accrocher son regard.

L’émotion monta en elle au même moment et brutalement la joie prit le dessus. C’était comme voir un aveugle retrouver soudain la vue.

— Ça fait un bien fou d'être dehors... On a réussi ! Oh la la, je ne sais même pas quoi dire... C'est tellement... incroyable.

Fanella fut prise d’une irrépressible envie de rire. Pour amuser Eugène elle poussa le siège en courant entre les gens.

— Oui on a réussi  ! On pourra sortir tous les jours si tu veux !

Après quelques secondes, sa mauvaise condition physique se rappela à elle, mais son enthousiasme était toujours intacte. Un large sourire sur les lèvres, elle parcouru avec lui les rues jusqu’à la passerelle sur le lac. Là, elle s’arrêta, essoufflée et un peu réchauffée par sa course. Sur l’eau noir se reflétaient les lumières de la ville, et l’agitation plus lointaine laissait place au vent dans la came des arbres. Fanella se souvint que cet endroit était beau et elle se demanda soudain si elle et Eugène n’allaient pas se retrouver pris dans une boucle d’euphorie alors même qu’ils étaient juste assis là dehors.

Il regarda encore un peu l’eau calme face à elle, pour essayer de retrouver le sien. Puis elle demanda avec un sourire dans la voix.

— Bon… où veux-tu aller ? Que veux-tu faire maintenant ?

Elle espérait que cette question revête plus d’un seul sens pour lui. Il était temps pour lui de commencer d’y réfléchir, puisqu’il était libre.
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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Lun 22 Aoû - 18:49
Eugène avait un peu paniqué lorsque Fanella lui avait proposé de subvenir à ses besoins. Des besoins qui pour l'instant ne lui sautaient pas aux yeux puisqu'il avait rarement été aussi bien traité qu'au sein du laboratoire. Cela le gênait de savoir qu'elle lui achèterait tout ce qu'il voudrait alors qu'il avait déjà l'impression d'abuser de son hospitalité mais il devait bien l'admettre ; il n'était pas encore en état de vivre seul, autant physiquement que mentalement. Et surtout, la scientifique avait raison en disant que satisfaire ses besoins, qu'ils soient matériels ou non, lui rendrait aussi sa dignité. Evidemment qu'il allait en discuter avec Carter, il y avait matière à parler et à avoir un second avis.

Mais pour l'instant, ils avaient une balade à l'extérieur à entreprendre et Eugène se concentra davantage sur son appréhension et son excitation que sur une histoire d'argent. C'était un moment important qu'il voulait pleinement savourer et vivre avec nulle autre que Fanella. Il se retrouva plongé au milieu d'une ville vivante bercée par la nuit et le vent froid, dont il faisait partie. Réellement. Les passants le regardaient, s'arrêtaient sur lui assis dans son fauteuil, mais au moins ils le voyaient exister. Leurs yeux ne traversaient pas le fantôme qu'il était jusqu'a présent. L'expérience lui tira des larmes et lorsqu'il capta le regard de Fanella, il sentit l'angoisse se changer en joie en elle et il crut un instant que son coeur allait exploser.

Elle se mit soudain à courir entre les passants et face à la vitesse que prenait son fauteuil roulant et les sensations, Eugène s'agrippa de toutes ses forces aux accoudoirs et laissa éclater un rire franc et léger qui enfla jusqu'à devenir incontrôlable. Les bâtiments qui défilaient semblèrent s'effacer un moment.

— Oui on a réussi ! On pourra sortir tous les jours si tu veux !

Prit dans une joie comme il en avait rarement connue, alimentée en plus par celle de la jeune femme, Eugène fut bien incapable de répondre à cette proposition de son amie mais elle allait rester gravée dans sa mémoire avec autant d'intensité que ce moment magique qu'elle lui offrait. Lorsqu'elle ralentit, essoufflée, c'était comme s'il avait couru avec elle, tremblant d'excitation, son corps tentant vainement de se remettre de l'expérience. Lorsqu'ils arrivèrent vers la passerelle, le médium fit de son mieux pour se tourner un peu sur lui-même et passer un bras derrière lui, sa main cherchant désespérément à agripper celle de Fanella.

— Je ne pourrais pas rêver mieux que de sortir tous les jours comme ça, surtout en ta compagnie, finit-il par lui dire.

Sa voix était frémissante, pleine de larmes glacées qui se perdaient au vent. Mais depuis peu, il savourait les retrouvailles avec ces larmes de joie qui effaçaient peu à peu la douleur d'une tristesse mélancolique. Son coeur cognait si fort contre ses côtes que s'en était presque douloureux. Pouvait-on s'envoler de bonheur ? Il se sentait presque plus léger que quand il était un fantôme.

La passerelle était calme. Le bois craquait doucement sous le froid et le vent et il pouvait entendre le clapotis de l'eau. Savoir Fanella heureuse derrière lui, à profiter du paysage, le laissa dans un état de presque béatitude. Le temps n'avait plus court, seulement le moment présent et il aurait pu se passer plusieurs heures sans qu'il ne sorte de cette transe, mélangé à l'esprit apaisant de la scientifique. Il se concentrait sur sa respiration et sur les ondulations de l'eau qui faisaient bouger le reflet des bâtiments et des lumières mais pour la première fois, il n'avait pas vraiment besoin de se détendre ou de se calmer. Il était en paix, il ne percevait plus rien d'autre que lui et Fanella.


— Bon… où veux-tu aller ? Que veux-tu faire maintenant ? lui demanda-t-elle finalement.

Devant Eugène s'ouvrait grâce à cette question un champ de possibilités inexplorées tout à fait gargantuesque. Avait-il réellement le droit de faire ce qu'il voulait, enfin, après tout ce temps ? Lui qui pensait ne pas savoir ce qui pouvait bien lui faire envie... Il s'était clairement fourvoyé. Une liste se dessina dans son esprit où tout un tas d'envies se battaient pour la place numéro une du podium. Il eut beaucoup de mal à se décider mais opta pour deux choses qui lui semblaient réalisables pour lui comme pour Fanella.

— D'abord, j'aimerai te serrer dans mes bras, si tu acceptes.

Dans l'ordre des priorités, c'était ce qu'il souhaitait le plus, partager ce moment pas juste en sa présence mais aussi physiquement. La serrer tellement fort qu'il parviendrait à lui faire comprendre toute l'intensité et la complexité de ce qu'elle venait de lui offrir et à quel point il se sentait proche d'elle.

Il se rappela également d'un moment où il avait avoué avoir très envie d'un cheeseburger, s'il était en état de revenir et d'en manger un. Cela ne semblait pas très approprié à une heure aussi tardive, mais après tout, Fanella était parfaitement capable de gérer son argent, sans doute mieux qu'il ne le ferait jamais. Il pouvait accepter de s'endetter un peu plus auprès d'elle, si en échange il lui permettait de passer un agréable moment dont elle se rappellerait.

— Et ensuite... je crois que je ne dirais pas non à un chocolat chaud.

Affirmer qu'il désirait quelque chose, admettre qu'il en avait le droit... encore une fois, comme elle le lui avait expliqué, cela lui fit énormément de bien. Il laissa échapper un petit rire à nouveau. Une boisson chaude leur ferait du bien après cette course dans le froid et il se souvenait qu'il avait adoré le gout du chocolat. Tout cela lui évoquait quelque chose de très réconfortant et d'autant plus symbolique.
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Fanella Ozark
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Jeu 25 Aoû - 23:40
Pour sûr, cette soirée resterait gravée à jamais dans son esprit. Fanella était un être discret et réfléchi. Avant de rencontrer Eugène, elle ne pouvait pas dire qu’elle était malheureuse. Elle était épanouie dans son travail, sa vie était remplie par ses découvertes. Mais elle avait rarement connu des moments de bonheur simple, authentiques comme c’était le cas à cet instant précis. Essoufflée, les yeux tournés vers ce paysages familier dont elle redécouvrait la beauté, son esprit faisait un pas en arrière. Qu’était-il en train de lui arriver ? La joie avait toujours été pour elle une émotion tranquille mais aujourd’hui, elle avait l’impression qu’elle allait exploser. Une partie d’elle savait déjà que c’était la présence d’un autre être à côté d’elle, à qui elle se sentait intimement connectée, qui avait démultiplié le phénomène. Tout ce qu’elle voulait c’était graver ce moment et toutes ses sensations pour pouvoir le retrouver toujours.

Alors elle sentit sa main sur la sienne toujours posée sur le fauteuil. Elle serra ses doigts engourdis par le froid autour des siens alors qu’une chaleur à la fois douce et vive se répandait dans son ventre. Son sourire, adressés à la nuit s’élargit encore un peu. Le discours d’Eugène fit écho à ses propres pensées.

— Je ne pourrais pas rêver mieux que de sortir tous les jours comme ça, surtout en ta compagnie,
répondit-il, la voix chargée d’émotion.

Fanella sentit les larmes lui monter mais pour rien au monde elle n’aurait changé quoique ce soit. Même la honte, même la peur de sembler folle ou bizarre semblait battre en retraite. Elle avait passé beaucoup de temps à redouter les étranges interactions entre son esprit et celui d’Eugène, les résonances émotionnelles. Celle-là était la chose la plus délicieuse qu’elle ait jamais connue.

— Moi non plus… souffla-t-elle en retour.

Ils restèrent là encore quelques secondes dans le silence, leurs doigts entrelacés avant qu’elle décide que cette soirée avant sans doute encore plus à offrir. Alors elle lui demanda à ce qu’il voulait faire maintenant. Elle savait que quoiqu’il demande, elle lui accorderait. Elle savait aussi que quelque soit la chose à laquelle il pense, elle l’apprécierait aussi. Elle en était certaine comme si elle aussi pouvait lire dans son esprit. Il prenait son temps pour réfléchir, alors elle attendait, comme un enfant qui attend de découvrir son prochain cadeau de Noël.

Malgré tout, la première chose qu’il lui demanda fut une surprise.

— D'abord, j'aimerai te serrer dans mes bras, si tu acceptes.

Elle sentit qu’elle acceptait avec son être entier. Déjà, elle faisait le tour du fauteuil pour chercher comment résoudre le petit problème de géométrie généré par le fait qu’il ne pouvait pas se lever de là pour l’instant. De là, elle pouvait voir beaucoup mieux l’expression de son visage et elle aima ça. Elle remarqua la faussette de sa joue et la courbe de son épaule. D’ici, elle pouvait sentir son léger parfum.

— Et ensuite... je crois que je ne dirais pas non à un chocolat chaud.

Elle sentit son propre sourire sur son visage s’élargir encore.

— Tu n’es pas difficile à contenter,
dit-elle presque en riant.

Elle n’avait pas honte de ce rire nerveux qui s’échappa d’elle. En temps normal, elle aurait tergiversé de longues minutes avant d’oser s’assoir sur ses genoux et poser sa tête contre son torse en fermant les yeux de la sorte. Là, son odeur emplissait ses narines autant que son esprit, elle pouvait sentir un coeur pulser tranquillement sous toutes leurs couches de vêtements pour se protéger du froid. Comme ses pensées vagabondaient librement, elle s’imagina soudain déposer un baiser sur le petit carré de peau à découvert que les replis de son échappe avaient laissé au vent, juste au creux de son cou, puis se redresser, prendre son visage dans ses mains… et à partir de là.. qui savait ?

Oui peut-être qu’il allait lire tout cela dans son esprit et plus tôt dans la journée, l’idée l’avait tétanisée de peur. À présent ça n’avait plus d’importance. Et alors. Peut-être que ce qu’elle ressentait pour lui était de l’amour, et alors ? Etre un peu aimé, peu importe si on veut le rendre en retour ou non, cela n’avait jamais fait de mal à personne. Peut-être qu’il choisirait d’en dire quelque chose, peut-être que non. Pour l’heure, elle voulait juste savourer ce sentiment, comme un tire sur soi une couverture chaude en hivers.
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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Ven 26 Aoû - 10:29
Le vent froid de la nuit aurait peut-être réussi à décourager Eugène mais pas ce soir. La main de Fanella qui serrait la sienne suffisait à le réchauffer de l’intérieur pour qu’il oublie l’air qui malmenait un peu ses habits et son visage. Il sentait que quelque chose changeait en elle, que tout était soudain différent. Il avait cru qu’elle réagirait comme au petit matin, qu’elle prendrait peur face à toutes ces pensées et ses émotions qui se tournaient vers une espèce de futur commun. Elle les laissait maintenant venir gentiment pour les apprécier à leur juste valeur, les laisser embellir tout ce qu’elle voyait. Comme si elle s’était décidée. Alors il lui avoua qu’il ne pouvait pas rêver mieux que tous ces moments passés avec elle. Il les attendait avec une impatience presque désespérée chaque jour au fond de son lit, que ce soit une simple discussion où une sortie comme celle-ci. Il la sentit sourire sans la voir et fit de même, caressant sa main du bout de ses doigts.

Puis la jeune femme lui demanda ce qu’il voulait faire, maintenant qu’ils étaient montés sur la passerelle pour observer le joli paysage. Eugène se rappela de ses paroles juste avant de sortir et les regretta un peu. Fanella savait qu’il n’allait jamais abuser d’elle et faire en sorte de proposer quelque chose qui leur plaisait à tous les deux, comme si elle lisait elle aussi dans son esprit. Il venait de comprendre que l’argent n’avait finalement aucun rôle à jouer entre eux et que tout ce qui importait, c’était les moments passés ensemble. Celui de ce soir prenait une intensité rare et il souhaitait que cela continue. Il voulait pouvoir la serrer contre lui, prolonger la douce chaleur qui se répandait dans son corps depuis leurs deux mains enlacées.

Fanella ne répondit pas mais il la sentit lâcher sa main pour faire le tour du fauteuil et Eugène se retrouva frémissant d’anticipation et d’excitation. Accepter sonnait comme une évidence et pourtant il se sentait toujours si honoré, si surpris, à chaque fois qu’elle lui accordait le moindre contact, la moindre attention. Il ne se demanda pas cette fois s’il le méritait ou non. Tout cela n’avait rien à voir avec le mérite. Elle connaissait son passé, ses peines, ses rares joies. Si elle le voulait c’est parce qu’ils se complétaient, pas de doute possible. Une fois en face de lui, le médium se demanda en même temps qu’elle comment ils allaient bien pouvoir faire pour s’enlacer le moins maladroitement possible. Il aurait tout donné pour se lever à ce moment précis mais il faudrait pour l’instant trouver une autre solution. Lorsqu’il lui proposa également d’aller boire un chocolat chaud, le sourire de la scientifique grandit encore.

— Tu n’es pas difficile à contenter.

Les mots se bousculèrent dans sa tête et il ne sut d’abord pas vraiment quoi répondre. Révéler qu’il n’avait jamais bu un chocolat chaud ou qu’il n’avait jamais été habitué à posséder quoi que ce soit à cause de la guerre aurait été bien triste. Il préféra se concentrer sur ce qu’il ressentait.

— Être avec toi ça me suffit… mais je voudrais l’être de plein de manières, en faisant toutes ces petites choses du quotidien qui m’ont manqué, souffla-t-il, transporté par cette joie communicative.

Finalement, sans même y réfléchir plus avant, Fanella vint s’installer sur les genoux d’Eugène. Estomaqué, il retint sa respiration tandis qu’une rougeur intense envahissait ses joues. Il s’était attendu à une proximité soudaine avec la jeune femme, il l’avait après tout demandée. Mais il ne s’imaginait pas une telle chose, même dans ses rêves les plus fous. Elle avait posé sa tête là, contre lui, et il s’était empressé dans un élan maladroit d’étreindre sa taille. Ses pensées à la dérive étaient si fortes contre les siennes qu’il se demanda un instant si ce qu’ils imaginaient, cet instant magique, venait de se produire ou non. Il en ressentait toutes les sensations brûlantes, de son ventre jusqu’à ses épaules, de son cœur palpitant jusqu’à ses jambes devenues cotonneuses. Il avait le sentiment surtout que cela pouvait être vrai et beau et authentique, pour peu qu’il laisse les choses se faire. Tout cela lui avait tellement manqué que s’en était à la fois grisant et douloureux. A travers ses yeux, il accepta de se trouver des qualités physiques aussi. Il comprit ce qu’elle pouvait peut-être lui trouver. Elle repoussa loin ses sombres idées, si loin que tant qu’elle était là, il ne pouvait pas les attraper.

Eugène y avait déjà pensé de mille manières bien sûr, au fait qu’il éteindrait peut-être sa montre si un tel moment devait arriver, autant pour ne pas se perdre dans les pensées et les émotions de Fanella que pour avoir ce moment, tout seul rien qu’avec elle, sans les fantômes. Mais dans ses bras, il ne les sentait même plus. Peut-être avaient-ils disparu, peut-être observaient-ils avec jugement ce qui se déroulait devant eux. Il n’en avait cure. Il aurait cru que la culpabilité et le visage de Joy s’imposeraient à lui, le frapperaient aussi fort qu’une gifle. Soudain il ne regrettait pas de se rendre compte qu’il n’y pensait pas. Pour la première fois, il acceptait de la laisser là où elle était sans difficulité. Il ne s’inquiétait même pas que Fanella puisse avoir peur, ou regretter ou que ces émotions qui le faisaient vivre puissent ne pas être réciproques. Leurs deux âmes rêvaient de ce moment, il le savait depuis un moment mais avait essayé de se le cacher, noyé par sa propre angoisse. Par pitié qu’on lui pardonne de ne pas réfléchir aux conséquences ou aux scénarios catastrophe. Qu’on lui pardonne, pour une fois, de penser d’abord au meilleur plutôt qu’au pire.

Il avait la soudaine impression que dire quelque chose allait gâcher ce moment incroyable. Tant qu’aucun mot ne sortait de sa bouche tout cela semblait irréel, caché, un précieux secret rien qu’à eux, inébranlable, inaltérable. Et pour dire quoi de toute façon. Le silence et les actes valaient parfois mille mots. Un être aussi démuni que lui dans une situation pareille n’aurait de toute façon rien trouvé de très beau à dire. Une des mains d’Eugène vint caresser doucement les cheveux de la jeune femme, ravi de constater leur douceur sous ses doigts. Il ne sentait qu’elle, elle ne sentait que lui. Il avait cette incroyable impression de l’avoir rencontrée depuis vingt secondes et de la connaître depuis vingt ans. Était-ce pareil pour elle ?

Eugène plongea son regard dans le sien au travers de ses lunettes rondes et s’y perdit quelques instants avec ravissement. Elle était sa nouvelle porte de sortie pour échapper à tout ses doutes, toutes ses peurs. Il aurait pu la scruter des heures et encore trouver de petits détails qui l’auraient fait fondre. La façon dont son visage dévoilait ses émotions, les petites mimiques qu’elle faisait sans s’en rendre compte lorsqu’elle réfléchissait. Sa main glissa une mèche de cheveux malmenée par le vent derrière son oreille et se posa sur sa joue. Si douce, si chaude, si vivante. Il ne s’y ferait jamais. Transformer le rêve en réalité, exactement comme ils l’imaginaient, distillait une émotion divine qui embrasait toutes ses veines. Alors Eugène pencha doucement la tête pour capturer les lèvres de Fanella contre les siennes, tremblant mais déterminé. Elles étaient si douces qu'il lui sembla impossible de s'en défaire. Tout son être l’enivrait, si bien qu’il perdait pied avec la réalité et le temps, comme s’ils ne faisaient qu’un. Il aurait fait durer ce moment pendant des heures, chacun de ses gestes empreint de douceur presque révérée, sonnant comme un serment, celui de partager avec elle tout ce qu’il avait, que chacun complète ce qui manquait à l’autre. Il ne désirait rien d'autre.
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Fanella Ozark
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 28 Aoû - 12:38
La première demande d’Eugène avait surpris Fanella. Elle ne s’attendait pas ce qu’il puisse si directement formuler ce souhait si directement. Cela participa sans doute du fait que soudain, elle se fichait de ce qu’il pouvait bien lire dans son esprit. Elle avait sourit et lui avait dit qu’entre un câlin et un chocolat, il n’était pas difficile de lui faire plaisir.

— Être avec toi ça me suffit… mais je voudrais l’être de plein de manières, en faisant toutes ces petites choses du quotidien qui m’ont manqué,
lui répondit-il.

Une fois, lovée contre lui, elle ne pouvait penser à rien d’autre que sa présence, son odeur, son coeur qui battait près d’elle. Elle songea à toutes les choses du quotidien qu’elle avait oubliées, noyée dans son travail.  Elle n’avait peut-être pas grandit dans un laboratoire, mais comme lui, elle avait des choses à rattraper sur le plan des relations humaines. Et toutes ces choses que l’ont faisait lorsqu’on prenait son temps. Ce serait peut-être son premier chocolat chaud, mais elle, depuis combien de temps n’en avait-elle pas bu, juste pour le plaisir, attablée à une terrasse plutôt que devant son ordinateur avec toutes sortes de chiffres qui défilaient ?

Elle ne répondit pas, parce qu’elle voyait que son geste l’avait surpris. Elle sentait que ses bras hésitaient ne sachant où trouver leur place autour d’elle. Il était rare qu’elle ait à ce point conscience de la petitesse de son corps. Là, elle était juste bien et pour elle aussi, c’était une chose rare. Mais ce moment-là n’était pas un espace vide où pouvaient surgir toutes sortes de pensées terribles qui la hantaient d’habitude. Au contraire, son coeur était plein. Dans l’hivers glacé de Salt Lake City, elle sentait un chaleur délicieuse l’envahir qui montait jusque dans sa nuque, irradiait même ses orteils dans ses petites bottines grises. Et les pensées qui la prenaient d’assaut cette fois n’avaient rien d’horrible. L’idée qu’elles étaient partagées les rendaient plus belles encore.

Sa main dans ses cheveux lui rappela les rares moments de sa petite enfance où elle était encore complètement innocente. Ses mouvements légers lui donnaient l’impression d’être une chose précieuse qu’on a peur de casser. Elle souffla doucement, parfaitement détendue et un petit nuage de buée lui échappa dans la nuit. Avant d’en faire l’expérience à cet instant précis, elle s’était imaginé l’amour comme une sorte d’ouragan balayant tout sur son passage. Elle était un peu surprise de constater qu’en fait il s’agissait d’un sentiment calme et fort à la fois, un peu comme une rivière qui s’écoule tranquillement, mais s’avance inexorablement vers la mer. Quoiqu’il en dise quoiqu’il réponde, elle s’écoulerait malgré tout alors elle n’avait pas peur.

À un moment, elle releva les yeux vers lui juste pour le regarder. D’un même mouvement, il se tourna vers elle. Elle observa son visage sur fond des étoiles et des quelques gratte ciels qu’elle voyait derrière lui. Elle essaya de déchiffrer son expression puis abandonna parce qu’elle n’avait jamais rien vu de tel. Au fond d’elle, elle savait exactement ce qui allait se produire sans pouvoir y croire vraiment pourtant. Alors elle attendit, tranquille, parce que rien ne pressait. Très doucement, il replaça derrière son oreille une petite mèche qui s’était échappée de son petit bonnet beige. Elle lui sourit, parce que cette fois, c’était certain, elle ne rêvait pas. Alors elle se redressa, juste un peu, pour lui faciliter les choses, juste avant qu’il ne l’embrasse.

Il lui sembla soudain que son coeur explosait, mais c’était tout sauf douloureux. Maladroitement, elle lui rendit son baiser. Savait-il que c’était le premier pour elle ? Sans doute parce qu’elle venait d’y penser, mais ça n’avait aucune espèce d’importance. Un peu gauche, elle posa sa main sur sa nuque,  découvrant toutes les sensations que ce simple contact soulevait dans son corps. Il était si doux, si prudent dans ces gestes. Cela témoignait de la valeur qu’il lui accordait alors, il n’y avait plus à douter. Elle ne se détachait que pour reprendre son souffle, savourant l’étrange fourmillement dans son ventre.

Puis elle voulu le regarder à nouveau. Son visage avait un peu changé, il semblait plus confiant. Avait-il eu peur qu’elle lui refuse ce moment, malgré tout ce qu’elle avait pensé ? Elle chercha quelque chose à dire, puis conclut que c’était parfaitement inutile. Son corps s’agita d’un grand frisson provoqué par l’air qui s’infiltrait entre eux. Ses dents commencèrent de claquer. Cela lui rappela la seconde demande d’Eugène et aussi qu’il valait sans doute mieux éviter qu’il ne prenne froid.  Lorsqu’elle se releva, elle manqua de chuter en se prenant les pieds dans les siens. Tout son corps tourné vers lui, semblait avoir oublier comment fonctionner. Elle rit un peu avant de passer derrière lui à nouveau puis de déposer un baiser sur sa joue, juste pour signifier qu’elle n’avait pas l’intention d’oublier ce qui venait de se passer. Malgré les gants se doigts peinèrent se fermer sur les poignées du fauteuil.

— Allons satisfaire ton deuxième souhait, déclara-t-elle joyeusement.

Elle avait l’impression d’être une sorte de génie tout droit sorti d’une lampe. Il était si plaisant de faire si facilement le bonheur de quelqu’un d’autre. Elle se demanda où l’emmener, elle qui sortait si peu. Elle voulait un de ces lieux où on trouvait toutes sortes de chocolat avec chantilly et chamalows. Alors elle se souvient qu’il y avait plusieurs années elle et sa mère s’étaient rendues dans un endroit dont elle avait aimé l’ambiance chaleureuse. Elle se mis en route d’un pas rapide pour essayer de se réchauffer un peu et aussi reprendre un peu contenance. En silence, elle essayait de faire le tour de ce qui venait de se passer dans son esprit. Elle n’aurait jamais pensé que cela puisse lui arriver à elle.
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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 28 Aoû - 19:27
Lorsqu’il était revenu à la vie, sur ce pont au milieu de cette forêt maudite, Eugène avait alors cru vivre sa renaissance, cet instant où il pouvait tout recommencer. Alors qu’en réalité, ce moment avec Fanella sur la passerelle où il pouvait l’enlacer contre lui semblait bien plus intense que tout ce qu’il avait vécu depuis qu’il l’avait rencontrée. Il avait un peu l’impression que se déroulait ce soir la vraie étreinte qu’ils s’étaient promis avant même le début de leur grand voyage. Tandis qu’il caressait ses cheveux doucement, comme par peur qu’elle ne s’évapore comme de la fumée entre ses doigts, ou qu’il ne se réveille seul au fond de son lit d’hôpital, il retraçait avec elle quelques souvenirs innocents tirés d’un passé lointain. Il savait qu’une ombre entachait ce tableau, un cauchemar monstrueux repoussé aux confins de l’inconscient. Il était heureux et fier de savoir qu’il ne sortirait pas pour gâcher ce moment, comme réciproquement elle chassait ses propres démons.

Depuis le début, il disait vouloir repartir de zéro s’il en avait l’occasion. Cela faisait un moment à présent qu’elle se présentait à lui, délicatement, jour après jour. Que ses sentiments s’épanouissaient comme une fleur arrosée avec juste ce qu’il fallait d’attention. Il en avait repoussé l’échéance avec énormément d’excuses différentes. Aujourd’hui avec Fanella et l’intensité de son regard, il ne voulait plus faire un pas en arrière, enchainé à son passé, mais un saut en avant. Dans le vide s’il le fallait. Voila une décision qu’il ne regretterait pas, celle d’avoir écouté son cœur. Alors il l’embrassa avec toute la douceur et l’amour refoulé qui n’attendait que de sortir, comme si elle était la chose la plus délicieuse et la plus agréable qu’il lui ait été donné de toucher. Un premier baiser pour elle mais pour lui aussi d’une certaine manière, le premier de cette nouvelle vie qui prenait tout son sens. Il frémit contre ses lèvres en sentant sa main se poser sur sa nuque ; comment se lasser, cesser d’être pris au dépourvu avec plaisir du moindre toucher lorsqu’on avait agonisé d’en manquer pendant si longtemps ? Ils se séparèrent un instant pour mieux se retrouver et Eugène put enfin la serrer du plus fort qu’il pouvait contre lui, comme il l’avait souhaité. Il n’avait jamais espéré qu’elle accepte de partager tellement plus.

Lorsqu’ils se séparèrent en cognant légèrement leurs deux paires de lunettes, il ne put s’empêcher de rire tendrement, infiniment plus léger. Il avait l’impression qu’on avait rempli son corps de nuages ou d’étoiles pétillantes. Malheureusement, après ce moment d’infinie chaleur, le vent traître les frappa à nouveau et Fanella ne put s’empêcher de trembler, allant même jusqu’à claquer des dents. Cela sonnait le signal de départ vers un lieu de repli, plus chaleureux et accueillant malgré le souvenir éternel qu’il allait garder de cette belle passerelle. La jeune femme manqua de tomber en se redressant et Eugène eut le réflexe de l’entourer par sa télékinésie pour lui éviter la douleur d’une blessure aussi petite soit-elle. Heureusement, plus de peur que de mal et il put la libérer de cette étreinte étrange la seconde d’après.

— On ne dit pas qu’on tombe amoureux pour rien, plaisanta-t-il avec légèreté. Si j’avais dû me lever, je crois que je serais tombé aussi.

En réalité, il aurait pu la garder sur ses genoux et pousser le fauteuil à la force de son esprit mais l’entreprise l’aurait épuisé, sans oublier les nombreux soupçons des passants que cette pratique étrange aurait soulevé. Ce serait peut-être pour une autre fois, dans les couloirs du laboratoire. Fanella se mit à rire à son tour et le son était si agréable à ses oreilles qu’il en ferma les yeux pour en savourer encore un peu l’existence.

— Allons satisfaire ton deuxième souhait.

Alors qu’elle poussait son fauteuil, il vit dans son esprit se dessiner des images de chocolat chaud bien trop appétissants et d’un endroit tout à fait chaleureux et accueillant. Il n’avait jamais rien imaginé de tel et se demanda un instant si cela existait réellement où si tout cela était tiré d’un rêve.

— Je ne savais pas qu’ils mettaient des… comment tu appelles ça ? Des guimauves ? Sur un chocolat chaud… Oh la la Fanella tu me donnes envie de tout goûter, comment on va faire ?

Il ne pouvait décemment pas demander un chocolat chaud mélangé à tout ce que l’enseigne vendait. Il n’arriverait jamais à le finir. Mais déjà l’indécision, avant même d’être arrivé, le prenait et agitait ses pensées. Les cacahuètes caramélisées avaient l’air bonnes aussi mais l’étaient-elles plus encore que les morceaux de cookies nougatine ? Et les Oréos, diable s’il savait quel goût cela avait mais ces biscuits étaient aussi intriguants qu’ils avaient l’air bons. Il ne savait pas qui il devait remercier pour que ce dilemme délicieux soit devenu sa première priorité mais il le remerciait fort. C’était mille fois plus agréable que ses angoisses habituelles.
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Fanella Ozark
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 4 Sep - 15:49
Fanella aurait voulu qu’il n’y ait pas de fin à ce moment. Mais après tout, celui d’après pouvait très bien être plus merveilleux encore. Leurs lunettes s’entrechoquèrent lorsqu’ils se séparèrent et la jeune femme manqua de perdre l’équilibre en se relevant du fauteuil. Alors l’impression d’être sur un petit nuage pris un sens plus concret encore lorsqu’elle sentit l’effort de la capacité d’Eugène pour la retenir, comme s’il la rattrapait avec des bras invisibles. Sans cela, son nez aurait peut-être rencontrer le sol humide de la passerelle. Elle salua cette délicate attention avec un sourire, en tirant sur le bas de son manteau pour le remettre en place.

— On ne dit pas qu’on tombe amoureux pour rien, commenta-t-il avec un rire. Si j’avais dû me lever, je crois que je serais tombé aussi.

D’ordinaire Fanella détestait qu’on se moque d’elle et de sa maladresse mais aujourd’hui elle était attendrie, d’autant plus qu’il disait qu’il ressentait la même chose. Malgré tout, comme elle était rattrapée par sa timidité naturelle elle répondit comme une scientifique.

— Je pense que si on nous mettait tous les deux dans un IRM, on verrait des choses étranges, ajouta-t-elle en joignant son rire au sein.

Malgré tout, elle se sentait a peu près capable de pousser le fauteuil après avoir posé un baiser sur sa joue, un des rares endroits de peau laissés accessibles par les manteaux, bonnets et autres écharpes. Ses doigts glacés sous ses gants agrippèrent les poignées et elle lui proposa d’aller concrétiser son deuxième souhait. Elle sortait peu mais se souvenait d’un endroit où elle s’était déjà rendue avec sa mère et qui avait le mérite d’être relativement proche de la passerelle. Elle avait décidé qu’Eugène n’aurait pas juste droit à n’importe quel chocolat chaud. Là, ils proposaient toutes sortes de variantes amusantes et originales. Elle-même commença à se demander ce qu’elle allait choisir, en se disant qu’elle n’aurait pas dû attendre tant de temps pour s’offrir ce genre de plaisir. Elle ne se doutait pas qu’il suivait comme toujours le court de ses pensées.

— Je ne savais pas qu’ils mettaient des… comment tu appelles ça ? Des guimauves ? Sur un chocolat chaud… Oh la la Fanella tu me donnes envie de tout goûter, comment on va faire ?

Fanella eut un nouveau rire à travers ses dents qui claquaient à cause du froid. Elle essaya mentalement de se souvenir de la carte écrite à la craie colorée sur une grande ardoise, mais sa mémoire lui jouait des tours. Elle se souvenait en revanche très bien de l’odeur qui prenait les narines quand on poussait la porte et le son de la petite cloche qui annonçait l’arrivée des nouveaux clients. Elle se souvenait du bruit du parquet sous ses pas et des rumeurs des conversations. Elle ne se souvenait pas de ce qu’elle avait commandé ce jour-là mais très bien du visage inquiet de sa mère qui lui demandait si elle mangeait suffisamment. Une curieuse chose, la mémoire.

— Des Chamallows Eugène, répondit-elle en affichant une guimauve dans son esprit pour lui apprendre la différence.

Elle reprit quelque peu son sérieux, alors que la marche la réchauffait un peu.

— Je ne sais pas ce que tu pourrais préférer… Mais je pense que le plus sûr c’est de décider que si ça te plaît, on reviendra.

Fanella rit à nouveau, parce qu’elle réalisa qu’elle avait prit beaucoup trop au sérieux ce problème qu’Eugène lui posait. Elle l’entraîna vers le centre ville actuellement bloqué par un énorme bouchon comme c’était souvent le cas. Sur la grande avenue les enseignes se succédaient et ici, les piétons étaient un peu plus nombreux à circuler entre les buildings dépareillés. La petite boutique de chocolat était juste un peu plus loin sur la droite, avec son petit croissant à la française peint sur fond vert pomme. La vérité était que s’il avaient fermé dans l’intervalle, elle n’aurait vraiment pas su où aller. Le son de la cloche et l’odeur furent les mêmes que dans ses souvenirs. Les petites tables de bois claires n’avaient pas même changé de place et au dessus du comptoir la carte en ardoise exhibait ses couleurs pastel. Elle leva les yeux et se décida assez rapidement pour un chocolat chantilly oréo et une brioche au Nutella, parce que maintenant qu’elle sentait le parfum sucré, elle réalisait qu’elle avait plutôt faim. L’idée de s’asseoir là sur une des banquettes aux coussins généreux avec Eugène en face d’elle la remplissait d’une joie comme elle en avait rarement connu. Elle savait qu’ils sauraient de quoi se parler, elle était sûre qu’ils allaient passer un bon moment.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Mar 6 Sep - 19:24
Fanella avait déposé un petit bisou sur la joue d’Eugène avant de reprendre son fauteuil en main derrière lui et cela ressemblait fort à une promesse scellée au clair de Lune. Celle qu’ils ne laisseraient pas derrière eux ce qu’il venait de se produire mais qu’ils allaient continuer ensemble, main dans la main malgré ses obstacles. Son sourire devait monter jusqu’à ses oreilles et il se cacha quelque peu dans son écharpe, ému par ce geste simple qui signifiait tant. A chaque contact sa peau s’enflammait et après leur étreinte, même le vent froid lui semblait presque doux. Lorsque la chercheuse évoqua avec humour une IRM, il se demanda si l’amour était visible dans une telle machine et à quoi toutes ces sensations pouvaient bien ressembler. Y verrait-on le même feu d’artifice sur les clichés ? Il n’était pas assez fin connaisseur en sciences pour le dire.

Ce qu’il savait néanmoins, c’est qu’ils se dirigeaient tous les deux vers un endroit charmant tiré des anciens souvenirs de la jeune femme, où il allait pouvoir déguster son premier chocolat chaud voire encore plus que ça. Les images lui donnaient faim, ce qui était rare. Il s’était laissé emporté par la joie et la légèreté qui s’était installée entre eux, heureux de n’avoir qu’à se soucier de ce qu’il allait bien pouvoir goûter.

— Des Chamallows Eugène, répondit Fanella lorsqu’il s’était interrogé sur les sucreries qu’on ajoutait à la boisson dans ses souvenirs. Je ne sais pas ce que tu pourrais préférer… Mais je pense que le plus sûr c’est de décider que si ça te plaît, on reviendra.

— Je suis convaincu que ça me plaira, affirma-t-il avec un sourire.

Après la passerelle, elle le conduisit à nouveau en ville et même le bouchon de voitures et leurs conducteurs courroucés qui rentraient du travail n’eurent pas raison de sa bonne humeur. Il observa d’un œil émerveillé les devantures encore illuminées pleines à craquer d’objets en tout genre, les décorations d’hiver installées sur les lampadaires. Son cœur rata un battement comme s’il avait manqué une marche lorsqu’il se rendit compte à quel point tout avait changé. Ses souvenirs ressemblaient à une vieille photo délavée en comparaison à ces maisons colorées, aux écrans toujours allumés et à l’agitation perpétuelle même en pleine nuit. Il ne se rappelait que trop bien encore du couvre-feu et du silence assourdissant uniquement interrompu par les avions de l’armée.

Fanella craignait que le lieu soit fermé et pendant un instant, la peur le gagna aussi jusqu’à ce qu’ils arrivent à la devanture. Il y avait quelques personnes à l’intérieur et à travers leurs esprits, il put percevoir les odeurs et les gouts, absolument formidables, qui le firent revenir au présent. Le magasin avait un petit aspect vieillot rassurant et malgré tout assez chic, comme un vin qui s’était bonifié avec l’âge. Le cœur d’Eugène battait la chamade lorsque Fanella le fit entrer et que la clochette dont elle se souvenait résonna. Il avait lui-même l’impression de retrouver un vieil endroit secret et rassurant, perdu hors du temps, quand bien même il n’y avait jamais mis les pieds. Si la jeune femme se décida rapidement, le médium, prit d’une quinte de timidité, eut l’impression de jouer sa vie récemment acquise sur le choix de son chocolat chaud. Il semblait presque tétanisé et s'assura d'avoir bien tout lu avant de choisir.

Comme il ne voulait pas trop faire attendre, il opta finalement pour une boisson chocolatée avec de la chantilly et du caramel beurre salé avec la fameuse guimauve qu’elle lui avait si bien vendu, ainsi qu’un cookie praliné qui lui avait fait de l’œil, avec ses petites pépites roses. Il y avait effectivement de quoi revenir plusieurs fois pour tout expérimenter. Le petit couple s’installa à une table, Fanella sur une banquette qui semblait confortable et Eugène en face d’elle toujours sur son fauteuil. Curieux et ému de se trouver là, il passa timidement ses doigts sur la surface boisée de la table, comme pour vérifier que ce n’était pas un rêve, qu’il était bien là, qu’il n’allait pas la traverser.

— J’aime beaucoup cet endroit, lui confia-t-il avec un grand sourire. Il est apaisant et il a un certain charme, je comprends pourquoi tu t’en es souvenue.

Il y avait peu de monde à cette heure, même s’ils avaient été intrigués par leur arrivée. Leur commande arriva vite, dégageant d’enivrantes odeurs sucrées. Eugène fit tourner son énorme tasse entre ses doigts qui se réchauffaient à son contact, l’admirant comme une œuvre d’art intemporelle et intouchable. Il attendit que Fanella entame sa propre boisson pour oser faire de même, comme s’il craignait de faire quelque chose d’illégal. Cela lui fendit le cœur autant qu’il chavira d’y porter ses lèvres pour goûter et rompre le charme que possédait une si petite chose. Le gout du chocolat suivi de cette petite pointe de caramel le détendit aussitôt tandis qu’une douce chaleur descendait dans son dos. C’était si délicieux qu’il ne se rendit pas tout de suite compte qu’un nuage de chantilly s’était déposé sur son nez, d’autant que ses lunettes s’étaient couvertes de buée. C’était définitivement sa boisson favorite et se retrouver ici avec Fanella manquait de lui couper le souffle.

— Mon instinct me dit que je devrais manger ça avant de boire, je crois que c’est comme ça que c’est censé marcher, plaisanta-t-il après avoir essuyé ses lunettes et louché sur son nez avec un petit rire.

Une petite cuillère trônait avec sa serviette qu’il s’empressa d’utiliser. Ce n’était peut-être pas grand-chose mais il était fier de pouvoir se servir de nouveau de ses mains. Il espérait que ses jambes finiraient incessamment sous peu par lui obéir aussi. Il imaginait déjà la tête que ferait la scientifique lorsqu’elle le verrait enfin marcher.

— Tu veux goûter ? lui proposa-t-il gentiment.

Il attrapa une petite guimauve et trouva cela aussi doux qu’un nuage. C’était juste fou, toutes ces nouvelles inventions culinaires.
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Fanella Ozark
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 11 Sep - 17:32
Eugène avait l’air convaincu que la suite de leur escapade lui plairait. Elle-même s’en savait rien et elle avait eu peur de ne pas retrouver la petite échoppe qui était réapparu d’elle ne savait où dans ses souvenirs. Elle fut soulagé lorsqu’elle la découvrit à nouveau avec ses odeurs, ses couleurs, ses sons, son ambiance feutrée. C’était parfait. La serveuse leur fit un sourire et commenta le froid dehors. Fanella lui répondit avec douceur un peu ailleurs, et prit le chocolat aux oréos et la brioche au Nutella dont elle rêvait dans le froid de l’hiver. Eugène prit son temps, hésita, mais après tout ils n’étaient pas pressés. La jeune femme fut patiente avec lui et lui parla des saveurs des différentes boissons. Fanella songea que de toute façon le caramel beurre salé et la praline décevaient rarement lorsqu’il fit son choix.

Fanella dirigea le fauteuil près d’une table libre et s’installa elle-même sur la banquette moelleuse. Savourant la chaleur elle retira son épais manteau qu’elle posa près d’elle.

— J’aime beaucoup cet endroit, déclara Eugène avec un sourire. Il est apaisant et il a un certain charme, je comprends pourquoi tu t’en es souvenue.

La jeune femme lui sourit en retour, parce que c’était ce qu’elle avait envie de faire dès qu’il la regardait. Elle doutait d’un jour s’habituer à ce sentiment qui la saisissait lorsqu’il l’observait, comme une chatouille chaleureuse dans son ventre et le rouge qui lui montait aux joues. Nerveusement, elle passa une mèche de ses cheveux derrière son oreille.

— Je ne sais pas pourquoi je n’ai jamais pris le temps de revenir ici après tout ce temps… je travaille un peu trop je crois…

Comme souvent maintenant sa phrase fut ponctuée de ce petit rire qu’elle ne maîtrisait pas. Elle sentait tout son corps modifier sa posture et les traits de son visage qui changeaient. Elle réagissait à sa présence, et toutes les sensations nouvelles qu’elle ressentait. Les commandes arrivèrent et l’odeur ravit la jeune femme. Mais ça n’était rien face au visage d’Eugène face à elle. Il lui rappelait à quel point ces petites choses de la vie de tous les jours ne devaient pas être prise pour acquises. Qu’avait-elle fait tout ce temps, à s’enfermer de son plein gré dans son laboratoire ? Quelle folie. Il serrait la tasse dans ses doigts avec une admiration de nouveau né qui découvre la lumière du jour. Elle songea avec tristesse qu’il était en effet très possible qu’Eugène n’ait jamais rien connu de tel. Sans prendre garde à la chantilly il y trempa ses lèvres. Fanella attrapa sa cuillère pour s’attaquer à son propre nuage et lorsqu’elle releva les yeux, un peu de crème ornait le nez d’Eugène entre ses lunettes. Elle éclata d’un rire franc et sonore.

— Mon instinct me dit que je devrais manger ça avant de boire, je crois que c’est comme ça que c’est censé marcher,
rit-il aussi et essuyant ses lunettes qui n’avaient pas été épargnées par la buée.

Fanella peina quelque peu à se reprendre. Tout semblait si drôle, comme lorsqu’on a pas assez dormi. Elle était délicieusement en train de perdre le contrôle. Il l’imita en mangea la chantilly sur sa boisson.

— Oui c’est mieux  ! répondit-elle.

Ils burent encore chacun quelques gorgés. Fanella l’observait n’en croyant pas sa chance. Le souvenir de leur baiser dans le froid remonta en elle avec force. Elle baissa légèrement les yeux vers son chocolat mais son sourire ne fondit pas pour autant.

— Tu veux goûter ? demanda-t-il soudain.

Elle hocha la tête et il prit dans ses doigts une petite guimauve dans sa tasse. Elle s’avança par dessus la table peu soucieuse de savoir ce qu’en penseraient les autres clients du petit café. Elle aima ses doigts si près de ses lèvres autant que sa saveur sucrée où se dégageait la pointe de sol du caramel. Elle déposa un baiser sur le dos de sa main, juste avant qu’il ne s’éloigne.

— J’aime bien, conclut-elle en souriant.

A son tour, elle lui tendit un oréo a moitié trempé de chocolat.

— Tiens, dit-elle encore.

Elle le lui tendit, et lorsqu’il l’eut mangé, elle caressa sa joue doucement, avant de ramener ses deux mains autour de sa tasse, presque timidement. Une partie d’elle restait convaincue qu’elle allait se réveiller dans le lit gris de son appartement. En pensée, elle tourna la tête et l’imagina près d’elle à demi-nu, son torse visible dans la lumière du soleil du matin qui filtrait à travers les stores. Cette idée la gêna un peu alors elle détourna les yeux pour les plonger vers le reste de son chocolat. Vite. Changer de sujet.

— Euh… Tu voudras rentrer après ou…


Elle même n’était pas sûr de vouloir déjà regagner les murs du laboratoire mais Eugène était peut-être fatigué. Il ne devait plus avoir l’habitude de la foule de la ville, du froid, du vent, de la circulation. Rien n’était aussi intense sans doute à l’époque d’où il venait.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Lun 12 Sep - 16:00
Fanella avait avoué que cela faisait très longtemps qu’elle n’était pas revenue dans ce petit café. Les années défilaient dans sa mémoire et elle attribuait cela à l’énorme masse de travail qu’elle s’était constituée et dans laquelle elle s’était enfermée. Il y avait de cela mais Eugène comprenait derrière ses paroles que ce n’était qu’une excuse parmi d’autres. Elle n’avait jamais vraiment trouvé de raison ou d’envie particulière de sortir ou quelqu’un avec qui elle était suffisamment à l’aise pour y revenir. Il était touché d’être cette personne ce soir. Mais aussi reconnaissant car sans son travail acharné qui l’avait privée de sorties, il ne serait peut-être pas là ce soir à déguster son premier chocolat chaud. Il n’aurait pas pu la serrer dans ses bras ou gouter au doux contact de ses lèvres contre les siennes. Et surtout, il pouvait aisément servir d’excuse pour toutes les autres sorties possibles et imaginables, s’il en fallait pour qu’elle ne culpabilise pas de délaisser l’œuvre de sa vie au bureau. Il en était ravi.

Bien sûr, lorsque leurs commandes arrivèrent et qu’Eugène put toucher du doigt la fameuse boisson chaude, son corps lui rappela soudain à quel point il avait toujours froid. Il chercha un instant du regard les fantômes mais ne sembla pas les trouver. Peut-être que l’amour, à contrario de la mort, les avaient repoussés, qu’ils avaient préféré continuer de se morfondre ailleurs. Ça n’avait aucune espèce d’importance et ce soir, il avait la force de ne pas s’attarder sur de petits détails futiles. Le chocolat chaud termina de le réconforter et lorsque la scientifique vit qu’il avait mis de la chantilly sur son nez, elle éclata de rire. Il fit de même en rougissant un peu, utilisant la petite serviette pour faire disparaitre sa mésaventure. Même à ce petit nuage de crème sucrée, il n’y avait jamais gouté auparavant. Il aurait pu se laisser envahir par la tristesse de constater qu’il était passé à côté de plein de choses mais au contraire, ce soir il saisissait l’opportunité de vivre à nouveau comme il l’entendait depuis le début. Cela faisait partie de sa vie désormais. Et Fanella aussi, ils se tenaient à présent main dans la main à suivre plus ou moins le même chemin. Il n’en croyait pas sa chance.

Elle semblait si différente et pourtant toujours la même lorsqu’il l’observait. C’était incroyable comme l’amour et la légèreté de la joie pouvaient transformer une personne. Il ne l’avait jamais vu sourire ou rire autant en une journée complète. Le médium ne se rappelait encore que trop bien de leur rencontre, de la panique, de ses difficultés. C’était comme si un voile s’était levé au-dessus d’elle et qu’elle pouvait maintenant resplendir à la lumière du jour, ou de la nuit. Elle repensait au baiser et s’il n’avait pas été un brin timide, il aurait saisi cette chance de recommencer. A la place, il lui proposa une guimauve et laissa un petit rire lui échappa lorsqu’elle se pencha au-dessus de la table. Attendri, il osa laisser son pouce effleurer doucement ses lèvres, un geste fugace qu’elle lui rendit en embrassant le dos de sa main. Encore une fois, il sentit le rouge monter à ses joues jusqu’au bout de ses oreilles à moitié cachées par son bonnet qu’il n’avait pas osé enlever. Il avait cependant totalement occulté ses problèmes capillaires depuis bien longtemps. Il récupéra sa main qu’il serra un peu contre lui comme pour garder la sensation de ses lèvres sur sa peau près de son cœur.

— J’aime bien, lui dit-elle avant de lui tendre à son tour un des fameux biscuits dont elle avait parlé plus tôt. Tiens.

Le cœur battant, il l’imita à son tour et croqua dans le petit oréo. A moitié fondu dans le chocolat chaud, il n’en restait pas moins croustillant et sucré à souhait. C’était agréable mais moins que Fanella qui déposa sa main sur sa joue. Instinctivement, il ferma les yeux et soupira de plaisir en sentant cette fugace caresse qui suffisait à faire pétiller son ventre. Comme s’il était un jeune adolescent qui ne se remettait pas des papillons. Il n’avait pas envie de s’en remettre. Il chercha quoi dire lorsque sa main s’en retourna vers sa tasse mais son esprit resta blanc quelques secondes.

— Je crois que ça va devenir un de mes biscuits préférés, j’en prendrais la prochaine fois, souffla-t-il finalement.

Alors qu’il voulait entamer son cookie praliné néanmoins, une drôle de pensée déferla dans l’esprit d’Eugène, une rêverie que Fanella n’avait pas pu empêcher puisqu’elle aussi pensait à moitié que tout cela n’était qu’un doux rêve. Bien sûr lui aussi s’était déjà imaginé dormir avec elle, la serrer sous de doux draps, comme blotti au cœur d’un nuage chaud et confortable. Il s’était déjà imaginé à quel point tout cela pouvait être réconfortant mais peut-être pas d’une telle manière et il sursauta lorsqu’il se vit dans son esprit. Il était certainement bien moins beau en vrai mais il savait les pièges que pouvaient jouer l’inconscient à un esprit amoureux. Il ne lui en tiendrait pas rigueur, car que verrait-elle si elle pouvait sonder le sien ? Quoi qu’il en soit, le visage entier du médium prit une couleur pivoine vive. S’il avait bu une gorgée de chocolat chaud ou croqué dans son gâteau, il se serait probablement étouffé et aurait attiré l’attention de tout le monde. D’une certaine façon, il remerciait le timing. Fanella changea vite de sujet pendant qu’il s’était momentanément caché derrière sa serviette pour reprendre contenance, mi amusé, mi gêné.

— Euh… Tu voudras rentrer après ou…

Eugène rit nerveusement et s’autorisa à finir son chocolat en quelques gorgées rapides avant de répondre. Cela l’aida à se concentrer sur lui et non sur elle encore. Il ne voulait pas rentrer, il ne voulait pas que cette soirée se finisse. Il ne voulait pas qu’ils se séparent. Peut-être qu’elle accepterait de dormir avec lui justement ? Se retrouver seul dans son lit d’hôpital l’angoissait maintenant qu’il y pensait.

— Je n’ai pas envie de rentrer, avoua-t-il. Mais ce serait plus raisonnable.

Son sourire était un peu triste, mais d’une tristesse normale et infime, celle de ce petit pincement au cœur qu’on avait lorsqu’on souhaitait qu’un moment dure une éternité. Mais au-delà de ça, il sentait effectivement que le voyage, le froid, les émotions, tout cela réuni l’avait un peu épuisé. Et surtout son ventre était plein de douceurs. Il essaya de chasser une impression gênante qui cherchait à se frayer un chemin pour proposer une nouvelle chose.

— Je ne sais pas si j’ai le droit mais… je me disais que… peut-être… on pourrait aller chez toi pour se reposer ? Enfin, mieux vaut sans doute rentrer, je ne veux pas d’ennuis auprès de Carter, je ne sais pas…

Eugène se mit à rire un peu nerveusement en repensant à ce qu’elle venait d’imaginer. Il ne voulait ni l’importuner ni lui en demander toujours plus alors que ce n’était que leur première sortie. Mais il ne s’était jamais caché que le laboratoire, bien que très différent de tout ce qu’il avait connu par le passé, n’était pas son endroit préféré. Il avait été si heureux d’en sortir, comme si une tension était restée derrière lui, enfermée là-bas. Mais bien évidemment, il comprenait que Carter ait besoin de le surveiller et rentrerait sans hésiter si Fanella lui disait que cela était réellement nécessaire. D’autant qu’ils n’avaient pas d’infirmière pour l’aider à se lever de son fauteuil et même si ses pouvoirs télékinétiques pouvaient le faire à sa place, la jeune femme n’était peut-être pas à l’aise de se retrouver avec cette responsabilité. Ils auraient juste moins d'intimité à son travail qu'à son appartement mais il ne voulait pas passer pour quelqu'un de capricieux. Il faudrait qu'ils se confrontent aux autres bien assez tôt de toute façon.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Sam 17 Sep - 23:16
De toute évidence, Eugène adorait les oréos. Tout le monde les adorait de toute façon mais lui faire découvrir ce qui pour elle relevait malgré tout de la normalité était un vrai plaisir. Fanella avait laissé ses pensées vagabonder, encouragées par les quelques contacts de leurs mains et de leurs bouches, ainsi que les saveurs sucrés du petit café. Eugène, sous sa forme de fantôme avait passé tellement de temps chez elle. Mais elle se l’imaginait avec son corps, torse nu, dans son lit. Elle avait détourné le regard et avait cherché à fuir cette idée.

La teinte pivoine que prit immédiatement le visage d’Eugène n’aida en rien. Le feu montait sur ses joues pourtant encore fraîches du vent glacé au dehors. Elle se tortilla sur sa chaise et fixa le fond de sa tasse à moitié vide. Malgré la gêne, la réaction vive de l’ancien fantôme ne fit que rendre l’idée plus intense encore. Si l’on essaye de ne pas penser à un éléphant rose… elle avait beau connaître le paradoxe de sa capacité, elle s’y plongeait chaque fois. Et puis, il fallait dire qu’il était plus difficile de se défaire d’une pensée aussi plaisante.  Alors son esprit y revint encore, la chaleur des draps et leurs peaux l’une contre l’autre. Mais il fallait changer de sujet avant que son corps ne fonde sous les effets mêlés de l’embarras et du plaisir. Elle n’osa pas lever les yeux, lorsqu’elle lui demanda ce qu’il voudrait faire ensuite.
Il fallait rester raisonnable après tout. C’était la première sortie d’Eugène depuis son retour à la vie.

— Je n’ai pas envie de rentrer, statua-t-il. Mais ce serait plus raisonnable.

Fanella s’autorisa à le regarder à ce moment pour voir son regard un peu triste. Elle aurait voulu lui dire que pour aujourd’hui ils ne pouvaient se soucier de rien, mais ça n’était tout simplement pas vrai. Elle se consola avec l’idée que bientôt, peut-être il aurait une vie complètement normale. Ils auraient… corrigea-t-elle mentalement. Elle perçu le changement de son expression, son léger sourire avec sa petite fossette qui réapparaissait mais rien n’aurait pu laisser présager de ce qu’il allait dire ensuite.

— Je ne sais pas si j’ai le droit mais… je me disais que… peut-être… on pourrait aller chez toi pour se reposer ? Enfin, mieux vaut sans doute rentrer, je ne veux pas d’ennuis auprès de Carter, je ne sais pas…


La jeune femme manqua de s’étrangler avec son chocolat. Toutes sortes d’images déferlèrent elle sans qu’elle puisse l’empêcher. Eux blottis sur le canapé devant un bon film, eux en train de manger des spaghettis. (Pourquoi des spaghettis ?  Elle n’en avait pas mangé depuis une éternité). Lui face à la grande fenêtre, admirant la vue debout et elle l’enlaçant par derrière pour poser sa joue contre son dos. Eux s’embrassant par dessus la petite table de la cuisine. Les draps défaits et…

Elle s’interrompit là mais que lui arrivait-il ?  Ce n’était pas comme si elle était habituée à avoir ce genre de pensées. Elle avait embrassé un homme pour la première fois ce soir, et voilà qu’elle se mettait à fantasmer. Évidement, il avait fallut que l’homme en question soit capable de lire dans les esprits pour ne rien arranger.

Cependant, elle estima qu’ils pouvaient survivre tous les deux à un moment de gêne supplémentaire alors elle releva les yeux et affronta son regard malgré ses joues brûlantes. Elle se racla la gorge maladroitement.

— Euh je suppose que je… je pourrais appeler Carter savoir si… c’est dangereux ou…

Elle se força à respirer. L’idée de devoir expliquer leur projet au médecin ne l’enchantait guère mais c’était sans doute plus prudent. Elle se consola avec l’idée qu’il était habitué à garder les choses pour lui et à ne pas juger.  Elle s’assura malgré tout d’avoir l’assentiment d’Eugène, parce qu’elle ne voulait pas l’humilier contre son gré. Elle décida de sortir dans le froid pour téléphoner. Elle ne pouvait pas gérer à la fois sa gêne, la réaction de Carter et le fait qu’Eugène pouvait lire ses pensées.

— Oh, tu sais je suis pour tout ce qui peut remonter le moral de mon patient, dit Carter lorsqu’elle exposa leurs projets.

Elle l’avait entendu manquer d’exploser et contenir très difficilement un mélange d’attendrissement et d’amusement. La jeune chercheuse était un brin vexée mais cela en valait la peine.

— Je vais juste prévenir Anastasia qui travaillait cette nuit, reprit le médecin, et t’envoyer son numéro, elle viendra si vous avez besoin de quoique ce soit. Demain matin Marie viendra chez toi refaire les pansements. Tu vois ? Rien de plus simple.

Fanella rit nerveusement et devant Carter elle n’aima pas ça. Elle le remercia malgré tout et mis fin à l’appel le plus vite possible. Le mauvais moment était passé, restait seulement les bons maintenant, même si visiblement ils n’avaient pas fini de rougir ni l’un ni l’autre. Elle resta un peu dehors, dans le froid alors que son imagination galopait de nouveau. Lui qui servait des chocolats chaud, leurs mains l’une dans l’autre sur la passerelle, la porte de la salle de bain ouverte et le bruit de l’eau qui coule, elle qui le pousse doucement sur le lit… Fanella se secoua et se força à se concentrer sur ici et maintenant. Elle fut aidée par les douces odeurs du petit café lorsqu’elle entra à nouveau.

— C’est bon,
annonça-t-elle d’une voix aiguë lorsqu’elle fut de retour à table.

Elle voulu finir son chocolat mais cela s’avéra presque impossible. Ils allaient prendre le bus pour rentrer, elle allait pousser la porte. Ils allaient allumer le chauffage jusqu’à ce que la douce chaleur monte. Elle allait le serrer dans ses bras, embrasser ses joues et sa bouche. Elle voulait juste se blottir contre lui toute la soirée. Et reprendre le contrôle sur son esprit galopant.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 18 Sep - 19:35
Eugène terminait doucement son délicieux chocolat chaud, enveloppé de la douce chaleur de la petite échoppe, des parfums gourmands autour de lui et surtout de la présence de Fanella à ses côtés qui le berçait de pensées à la fois palpitantes et agréables. Même dans ses rêves les plus fous il n'aurait pas osé fantasmer jusque-là et voilà qu'il pouvait presque toucher du doigt ce que serait leur futur. Cela semblait trop incroyable et beau pour être vrai alors il avait rougi sous le coup des images et des émotions qui prenaient plus de force dans son esprit. Bien sûr, que les pensées de la jeune femme soient mises à nu devant lui était gênant, autant pour elle que pour lui. Alors elle avait changé de sujet en lui posant la question de savoir s’il voulait rentrer.

Il n’avait pas besoin de se voiler la face, une certaine fatigue commençait à tomber sur les épaules du médium. Il le regrettait un peu car à part se faire pousser et porter Fanella dans ses bras il n'avait pas fait grand-chose. Physiquement parlant du moins. Il ne voulait pas que cette soirée se termine et encore moins retourner au fond de son lit au laboratoire alors, enhardi par leur relation naissante et l'engouement de Fanella, il avait demandé s'il pouvait plutôt passer la nuit chez elle. Après tout, lui aussi ne demandait qu'à l'enlacer toute la nuit sous les draps chauds et doux. A pouvoir respirer son odeur, se permettre peut-être une première nuit de paix, sans angoisse dévorante ou l’impression que tout ceci n’était qu’un rêve à son réveil. Il ne pouvait que se sentir exister dans ses bras, il ne pouvait en être autrement. D’autres images déferlèrent qui semblèrent faire fondre son cœur tel les chamallows qu’il venait de dévorer. De petites scènes de la vie quotidienne mais qui lui avaient tant fait défaut. Ils regardaient un film sur le canapé et il se rappela de sa première nuit, lorsqu’il était resté devant Netflix en attendant qu’elle revienne, où il avait vu les premiers hommes atterrir sur la Lune. Ses yeux se mouillèrent de larmes pleines d’un amour indescriptible tant il était fort et plein de reconnaissance. Lorsque leurs regards se croisèrent a nouveau son visage était illuminé d'une joie douce, pleine de gratitude et attendrie. Le futur qu'elle imaginait lui plaisait tant qu'il ferait tout pour qu'il devienne réalité. Quitte à se battre pour ça. Il se sentait si heureux et comblé en se voyant avec elle. C'était là la vie qu'il voulait mener, la plus normale possible, à ses côtés.

— Euh je suppose que je… je pourrais appeler Carter savoir si… c’est dangereux ou…

Eugène hocha la tête rapidement, trop ravi qu’elle accepte son idée pour prononcer le moindre mot. Il avait l’impression d’être en train de mourir, de bonheur cette fois. Son cœur battait férocement à ses oreilles et ce ne fut que lorsque Fanella sortit pour passer un coup de fil au médecin qu’il s’autorisa enfin à respirer. Il avait soudain l’impression qu’on l’avait mis dans un four, sa tête tournait un peu et par réflexe, il appuya d’une main tremblante sur la montre que la jeune femme lui avait offerte. Les pensées diffuses de la scientifique se coupèrent soudain, ainsi que celles des autres personnes dans la petite échoppe et il eut l’impression de se retrouver une nouvelle fois seul au monde, mais avec l’esprit un peu plus clair. Tout cela avait été tellement grisant qu’il s’était un instant perdu dans le tourbillon de pensées et d’émotions qui s’échangeaient entre eux, comme deux tornades entrant en collision.

Presque aussitôt, la béatitude céda un brin la place à l’inquiétude et au regret et il serra ses mains contre lui. Et s’il arrivait quelque chose à Fanella dehors et qu’il n’était pas au courant ? Non, inutile de penser à cela, elle était au téléphone avec Carter et allait évidemment le tenir informer de la décision du médecin dès qu’elle reviendrait. Il rongea son frein en attaquant son cookie praliné à pleines dents, observant du coin de l’œil ce qui l’entourait avec un peu plus d’attention. Il prit aussi le temps de réfléchir et de se tempérer autant que possible sur ce qu’il venait d’arriver. La situation s’enflammait vite, peut-être un peu trop et cela pouvait amener son lot de dangers. Lorsque la scientifique revint à l’intérieur, il fut alerté par le son de la petite cloche sinon il ne l’aurait peut-être même pas remarqué, protégé par la bulle tampon de sa montre. Il se tourna vers elle et lui adressa un grand sourire même si son cœur qui avait retrouvé son calme s’emporta de nouveau quelque peu.

— C’est bon, déclara-t-elle d’une petite voix joyeuse.

Il crut à nouveau que sa poitrine allait éclater sous l’effet de l’émotion et de la surprise. Mais cette fois, ce n’était que de sa faute, ses pensées étaient claires et il attrapa sa main en la serrant un peu dans les siennes, plongeant ses yeux une nouvelle fois dans les siens. Si elle voulait regarder un film, il serait ravi de s’installer sur le canapé avec elle. Bon les spaghettis devraient attendre, il avait décidément bien trop mangé ce soir. Un peu gêné, il sentit malgré tout le besoin de se justifier et désigna la montre.

— Désolé, je ne voulais pas provoquer de larsen, c’était un peu fort tout ça pour moi et je me dis que tu préfères peut-être garder un peu ces pensées pour toi aussi. On a plein de choses à rattraper et je te promets que nous réaliserons tout ce que tu imagines, mais on a le temps pour ça n’est-ce pas ? Je ne vais pas disparaitre de sitôt…

Cette situation était comme une cocotte-minute montant en pression. Elle risquait d'exploser avant la fin de la soirée et le fantasmes de Fanella risquaient de finir par la rendre plus malheureuse qu'heureuse. Il ne voulait pas la décevoir ou qu'elle finisse par ne pas se sentir à la hauteur, confrontée finalement au mur de son inexpérience, tout comme lui. Il ne voulait pas qu’elle ait peur et profiter de chaque goutte de bonheur distillée, sans en rater une miette, une seule seconde. Il avait peur qu’elle le prenne mal alors il préféra continuer sur une touche d’humour en posant la main glacée de Fanella contre sa joue encore un peu rouge et chaude.

— Je tiens quand même à te prévenir… Je suis frileux et j'ai tendance à dormir avec de grosses chaussettes. Si tu as chaud je ne vais pas te lâcher.

Il se mit à rire joyeusement et libéra sa main pour qu’elle puisse aller payer leurs deux chocolats et les pâtisseries. Ce n’était pas grand-chose et il tâcha de ne pas s’en formaliser, préférant plutôt se concentrer sur le vent qu’il allait falloir affronter de nouveau.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 25 Sep - 18:15
Fanella n’aurait jamais cru qu’Eugène oserait, si directement, demander à ce qu’ils aillent chez elle ensemble. Toute cette soirée était relativement incroyable à ses yeux de toute façon. Son esprit avait donc formé des pensées galopantes sur ce à quoi pourrait ressembler la suite de cette nuit, mais aussi, la suite de cette relation. Les rêveries montaient en elle comme une bouffée irrépressible et l’emplissaient d’un délicat sentiment de chaleur. Elle osa à peine relever les yeux, juste assez pour voir les larmes monter dans ses yeux. Tout ce qu’elle voyait défiler en elle, il le voyait aussi, elle pouvait dire que cela le remplissait de joie. Il s’en fallu de peu pour qu’elle ne laisse les émotions prendre le dessus. Rapidement, elle proposa de demander à Carter l’autorisation de conduire Eugène chez elle et dès qu’il acquiesça elle s’éclipsa un peu tremblante, un sourire sur les lèvres.

Entendre la joie dans la voix du médecin ne fut pas une partie de plaisir parce qu’après tout, il s’agissait de son intimité. Mais elle obtint son accord moyennement quelques ajustements de l’organisation. Demain matin, une infirmière viendrait refaire les pansements. Ensuite il devrait sûrement rentrer au laboratoire… mais il était trop tôt pour s’en inquiéter. Elle profita de l’air frais pour se calmer un peu, reprendre ses esprits. Mais même dans le froid son imagination ne la lâchait pas. Elle aurait reprit quelque peu le contrôle avant de franchir à nouveau la porte de la petite boutique.

Elle maîtrisa mal sa voix lorsqu’elle annonça à Eugène qu’elle avait obtenu l’accord du médecin. Le son sorti plus aigu qu’habituellement. Lorsqu’elle regagna sa place il attrapa sa main dans la sienne et ce simple contact suffit à achever de la réchauffer. Il désigna sa montre et immédiatement Fanella comprit qu’il l’avait rallumée. Elle aimait cette totale transparence entre eux, s’il n’avait lu ses pensées jusqu’ici aurait-il été si courageux ? En même temps, se sentir ainsi à nue dans ce moment si particulier l’épuisait. Elle imaginait des choses et il les voyait, puis l’expression de son visage la poussait à en imaginer d’autres encore…

— Désolé,
dit-il. Je ne voulais pas provoquer de larsen, c’était un peu fort tout ça pour moi et je me dis que tu préfères peut-être garder un peu ces pensées pour toi aussi. On a plein de choses à rattraper et je te promets que nous réaliserons tout ce que tu imagines, mais on a le temps pour ça n’est-ce pas ? Je ne vais pas disparaitre de sitôt…

Fanella risqua un sourire. Elle avait presque oublié cette notion de larsen et elle était touchée qu’il s’en souvienne. Simplement, elle n’avait pas pensé au fait qu’ils pourraient connaître aussi des larcins d’émotions positives. Mais en effet, s’il n’avait pas éteint la montre, la situation aurait pu être hors de contrôle assez rapidement.

— Tu n’as pas à t’excuser et tu as raison… nous avons tout le temps du monde.

Elle voulait y croire de toutes ses forces. Que personne en viendrait leur nuire à cause de la capacité d’Eugène, que personne ne l’enfermerait à nouveau elle ne savait où dans un laboratoire sombre. Elle ne savait pas encore ce qu’il allait faire de sa vie, mais elle avait hâte de le découvrir. Son esprit avait imaginé en condensé un avenir, pour pouvoir le tenir tout ensemble. Mais il se passerait déjà des mois avant qu’Eugène puisse se mettre debout face à la vue de son appartement comme dans sa rêverie.

— Je tiens quand même à te prévenir…
reprit-il avec un rire. Je suis frileux et j'ai tendance à dormir avec de grosses chaussettes. Si tu as chaud je ne vais pas te lâcher.

Fanella s’autorisa à rire aussi. Le larsen se poursuivait, mais à échelle humaine cette fois. Elle rougit un peu car cela voulait dire qu’Eugène s’était vu torse nu dans son esprit.

— Je suis un être humain avec des fantasmes ce n’est pas pour autant que j’y crois, se justifia-t-elle avec amusement, mais dis-moi Eugène, penses-tu vraiment que j’ai la moindre idée de comment faire cuire des spaghettis ? Je ne crois pas avoir déjà cuisiné un vrai repas moi-même…

Elle n’avait jamais été stupide au point de croire que ce qu’elle projetait dans son esprit deviendrait l’exact réalité. Leurs chocolats terminés, elle alla régler l’addition et elle attrapa le siège d’Eugène à nouveau. Il fallut affronter le froid qui semblait encore plus intense à présent que la soirée avançait. Ils furent seuls à l’arrêt de bus. Fanella dansa d’un pied sur l’autre un peu pour se réchauffer avant d’oser s’assoir à nouveau sur ses genoux et poser la tête sur son épaule en grelottant. Un jour, il faudrait qu’elle songe à passer le permis de conduire. Sa vie de jeune adulte était passée trop vite, décidément, le nez plongé dans ses livres.  Lorsque le véhicule arriva, il fallut encore attendre qu’il s’abaisse pour permettre l’entrée du fauteuil. Cela ne fut pas une mince affaire car il y avait du monde mais au moins ici régnait une douce chaleur.  Elle resta debout derrière lui, attrapant une de ses mains dans la sienne. L’appréhension qu’elle ressentait à l’idée de le recevoir chez elle s’estompait peu à peu pour laisser place à une joie franche. Elle ne savait pas ce qu’ils allaient faire exactement et cela n’importait pas. Ils feraient bien ce qu’ils auraient envie au moment ou cela leur viendrait. Son immeuble n’était pas loin de l’arrêt de bus et heureusement il comprenait un ascenseur. Pendant leur chemin jusqu’au huitième étage Fanella tremblait toujours de froid.  

Le logement était toujours aussi gris, et froid. Le chauffage ne tournait pas. Elle alluma une lumière ou deux et posa les clefs sur le petit meuble de l’entrée.

— Ne bouge pas, je vais mettre en route la chaudière…

Elle le poussa jusqu’au salon avant de s’en aller vers le couloir où se trouvait le tableau électrique. Qu’allait-elle faire maintenant ? Elle n’en avait aucune idée. Fantasmes ou pas, elle ne s’était jamais trouvée dans cette situation. Elle s’assit simplement sur le canapé, regardant Eugène en souriant, en attendant que la chaleur monte un peu. Elle voulait qu'ils s'allongent tous les deux l'un contre l'autre, mais n'osait rien proposer.
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Eugène (The Sorrow)Lost Ghost
# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Lun 26 Sep - 16:42
Eugène allait donc passer la nuit chez Fanella, Carter en avait donné l’autorisation. Sa première nuit hors du laboratoire, en compagnie de la jeune femme qu’il venait juste d’embrasser. L’idée le rendait fou de joie. Il ne savait pas exactement comment les choses allaient évoluer ce soir, s’il dormirait sur le canapé ou avec elle et nul doute que son retour le lendemain serait un peu difficile mais il ne voulait pas penser à tout cela pour l’instant. Allumer sa petite montre avait cet effet bizarre de lui permettre de se concentrer davantage sur ses propres pensées que sur celles des autres, même si elles étaient habituellement innombrables à flotter dans sa tête. Au final, il faisait taire les fantômes mais laissait la parole à son esprit qui aimait se saboter tout seul. Alors il avait pris la main de la jeune femme pour la serrer un peu et rester concentré sur elle, même s’il n’avait plus accès aux images enflammées de son esprit. Bien entendu, il le lui expliqua et fut soulagé de voir qu’elle le prenait bien. Un instant, il avait craint qu’elle se mette à penser qu’elle l’incommodait avec tout ce qu’elle ne pouvait s’empêcher d’imaginer alors qu’il avait simplement voulu remettre un peu les pieds sur terre avant de s’envoler entièrement. Pour détendre l’atmosphère, il tenta une boutade qui, heureusement, fonctionna.

— Je suis un être humain avec des fantasmes ce n’est pas pour autant que j’y crois, se justifia-t-elle avec amusement, mais dis-moi Eugène, penses-tu vraiment que j’ai la moindre idée de comment faire cuire des spaghettis ? Je ne crois pas avoir déjà cuisiné un vrai repas moi-même…

Eugène non plus n’avait jamais cuisiné. Ils formaient une belle paire mais il n’allait pas laisser ce petit inconvénient l’inquiéter. C’était un défi qu’ils pouvaient agréablement relever à deux et dont ils seraient fiers. Il s’imagina dans la cuisine essayer de préparer quelque chose à ses côtés et rire de leurs petites maladresses. Instinctivement, il caressa le dos de sa main qu’il tenait toujours. Lui, il voulait y croire, de toutes ses forces.

— J’ai vu des hommes aller sur la Lune avec ton Netflix la nuit de notre rencontre… On devrait bien trouver une âme charitable qui nous montrera comment cuisiner quelques petites choses.

Grâce à l’internet qu’il n’avait fait qu’effleurer du doigt, tout lui semblait possible. Il la laissa payer leur consommation et en profita pour refermer un peu sa veste, resserrer son écharpe. Sortir après avoir passé du temps dans la chaleur douce du café fut une épreuve qui le crispa quelque peu mais il savait qu’une fois dans l’appartement de Fanella tout irait mieux. Elle l’emmena jusqu’à un arrêt de bus désert et s’installa une nouvelle fois sur ses genoux. Il le vit encore moins arriver que la première fois puisque sa montre était toujours éteinte mais accueillit le geste avec une surprise pleine d’enchantement. Elle tremblait de froid et il la serra contre lui, en profitant pour frotter son dos aussi énergiquement que possible, la joue posée contre son bonnet. Il ne pouvait pas bouger autant qu’elle et le froid semblait en profiter pour l’attaquer, lui aussi.

Lorsque le bus arriva évidemment elle le lâcha et il fallut descendre la rampe pour permettre au fauteuil de monter. Il y avait autant de monde à l’intérieur qu’en voiture tout à l’heure et Eugène s’excusa à maintes reprises de mettre en retard tout le monde et d’être la source de tant d’efforts, honteux de ne pas pouvoir se débrouiller. Être le centre de l’attention même pour quelques secondes provoquait en lui une sensation étouffante et une fois à l’intérieur il attrapa la main de Fanella une nouvelle fois pour se rassurer. Personne ne lui reprocha quoi que ce soit évidemment et de toute façon personne à part Fanella ne savait exactement tout ce qu’il avait traversé pour en arriver là mais il s’imaginait tout seul des pensées accusatrices qui le forcèrent à regarder le sol. Heureusement, il put se concentrer sur la ville qui défilait et les mouvements du bus qui apportaient leur lot de sensations étranges pour penser à autre chose. Le même manège eut lieu à leur arrêt et il s’excusa encore auprès du chauffeur une dernière fois. Ensuite il fallut entrer dans l’immeuble, prendre l’ascenseur et lorsque le jeune couple arriva enfin à l’appartement, le médium était plus épuisé et frigorifié qu’il ne l’aurait imaginé.

— Ne bouge pas, je vais mettre en route la chaudière…

— Merci de m’accueillir chez toi, lui dit-il gentiment. C’est… émouvant de revenir maintenant.

L’appartement était en effet bien froid aussi puisqu’elle n’y mettait que très rarement les pieds mais c’était mieux que dehors et il cessa un peu de greloter. Elle l’avait emmené au salon et bien que l’endroit lui semble familier, il avait l’impression de le redécouvrir pour la première fois. C’était le cas, d’une certaine manière puisqu’aujourd’hui il était bien là, ancré dans la réalité. Il pouvait toucher les murs et les meubles, sentir l’odeur de la pièce. Fanella revint accompagnée du vrombissement de la chaudière et s’installa sur le canapé. Elle lui adressa un sourire et il plongea ses yeux dans les siens, s’y perdant un court instant. Que faisaient-ils maintenant, telle était la question. Il voyait encore les images frémir et vaciller comme une flamme balayée par un souffle. Commencer par quelque chose de simple et de faisable, étape par étape, songea-t-il. Il faisait toujours un peu froid mais le chauffage allait remédier à tout cela alors il commença par défaire son écharpe et s’extirper de sa veste mais il n'osa pas toucher à son bonnet.

— Est-ce que tu crois que je peux venir à côté de toi ? Tu veux regarder quelque chose à la télé ? proposa-t-il timidement.

Il s’imaginait la serrer dans ses bras encore et encore sous un plaid bien chaud, confortablement installé. Il ne savait pas quoi regarder mais il n’était pas difficile. Des couleurs sur un écran, rien que ça c’était spectaculaire. Il rapprocha son fauteuil du canapé pour l’y coller et enleva l’accoudoir pour pouvoir glisser plus facilement, sans qu’elle ait vraiment besoin de le porter pour y arriver. Dans tous les cas, il savait qu’il ne finirait pas par terre et que ses fesses atteindraient sa future destination, qu’il doive employer les grands moyens, c’est-à-dire ses pouvoirs, ou non. Il s’aida de ses mains pour se pousser un peu et la translation se fit heureusement sans encombre. Le canapé était tellement plus confortable que le fauteuil qu’il crut un instant le traverser en s’enfonçant à l’intérieur et son cœur rata un battement. Mais la résistance de la matière était toujours là et son corps lourd aussi. Tout allait bien se passer.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Dim 2 Oct - 23:24
Fanella était ravie parce qu’au final, ils avaient rit ensemble du côté irréaliste de ses fantasmes, après qu’Eugène ait enclenché la montre. Elle avait appris qu’il dormait toujours habillé parce qu’il craignait le froid et elle lui avait expliqué qu’elle ne savait en rien comment cuisiner des spaghettis. Le fait qu’ils s’en amusent ensemble l’avait rassurée.

— J’ai vu des hommes aller sur la Lune avec ton Netflix la nuit de notre rencontre… On devrait bien trouver une âme charitable qui nous montrera comment cuisiner quelques petites choses.

La jeune femme avait oublié cet épisode mais en effet, Eugène avait fait connaissance avec quelques unes des nouvelles technologies de ce siècle. Elle lui décocha un sourire.

— On devrait bien trouver une recette sur Youtube.


Le trajet en bus lui sembla long, surtout les moments où le bus devait s’abaisser pour lui permettre de monter.Elle n’aima pas le voir s’excuser de la sorte. Heureusement tout les passagers lui répondirent avec bienveillance. Le temps fut quelque peu occupé en explications sur ce qu’était Youtube mais elle doutait qu’il ait tout compris. Elle fut malgré tout soulagée lorsqu’ils pénètrent dans son appartement. Sa fatigue était perceptible. Un peu nerveuse, elle couru allumer la chaudière. Si elle avait su, elle l’aurait mise dès le matin. Sauf qu’elle n’avait pas dormi là cette nuit, ni la nuit d’avant d’ailleurs.

— Merci de m’accueillir chez toi, lui dit-il avec un sourire. C’est… émouvant de revenir maintenant.

Lorsque le ronron du chauffage monta, elle s’assit sur le canapé, hésitante pour l’observer alors que lui aussi retirait sa veste. Elle remarqua qu’il gardait son bonnet. Elle prit le manteau pour le suspendre parce qu’elle voulait lui éviter l’embarra de ne pas savoir quoi en faire.

— De rien Eugène, c’est vrai que la dernière fois tu étais encore… sous ton ancienne forme…

Elle frotta ses mains l’une contre l’autre parce que la chaleur tardait à monter. Elle gardait de bons souvenirs de leur cohabitation passagère mais le voir ici en chair en roues et en os était si différent. Surtout que leur relation avait tant changer. La joie dominait encore l’appréhension malgré tout. Elle le regardait et elle peinait à croire qu’il était en quelques sortes « à elle » pour l’instant au moins. Qui était-il pour elle maintenant ? Son « copain », son « compagnon » tous ces mots lui plaisaient mais aucun ne semblait recouvrir cette réalité.

— Est-ce que tu crois que je peux venir à côté de toi ? Tu veux regarder quelque chose à la télé ?


Le sourire de Fanella grandit un peu. Evidemment qu’il pouvait venir à côté d’elle. C’était tout ce dont elle rêvait. Juste se lover là avec lui. Sa timidité était si touchante. Comme s’il pensait ne pas y avoir droit. Elle ne devait pas être loin de la réalité d’ailleurs. Elle allait ouvrir la bouche pour répondre mais la sonnerie de l’interphone retentit. Son visage se tendit immédiatement car la première personne à qui elle pensa fut sa mère. Cela serait juste la pire des choses qu’elle débarque à ce moment précis.

Dans son dos, Eugène effectuait un transfert complexe en direction du canapé lorsqu’elle décrocha. Elle pria pour qu’il ne se casse pas la figure.

— Oui bonsoir, c’est l’infirmière, expliqua la voix dans l’oreille de Fanella et elle soupira de soulagement, cet idiot de Carter n’a pas pensé aux traitements du soir, ni aux affaires, ni aux antidouleurs de secours… alors j’ai pris la liberté de passer…

— Je descends,
répondit Fanella d’une voix un peu plus aiguë qu’habituellement.

Presque en dansant, elle sortit d’un petit coffre gris un plaid épais qu’elle tendit à Eugène.

— L’infirmière est en bas avec tes médicaments et des affaires… je reviens, installe toi.

Ce soir-là, l’ascenseur lui semblait plus lent qu’habituellement. Elle aima le sourire de la jeune femme qui lui fourni toute sortes de recommandations bienveillantes et l’enjoignit encore une fois à ne pas hésiter à la déranger s’ils avaient besoin de quoique ce soit. Mais ce dont ils avaient besoin à présent c’était sans doute un peu d’intimité. Lorsqu’elle remonta, elle constata que la chaleur avait monté.

— Enfin tranquilles, lâcha-t-elle, puis elle alla chercher le petit ordinateur sur le bureau pour le brancher à l’écran de télévision. Avec Eugène dessus, son canapé ne lui avait jamais semblé si chaleureux.

— Alors, reprit-elle, mi nerveuse mi joyeuse, est-ce que tu veux voir Interstellar avec moi pour rester dans le thème de l’espace ? Bon peut-être pas en entier parce qu’il dure 4h mais… ou un documentaire ?

Fanella pensait à ce film en particulier parce qu’elle l’avait revu lorsqu’elle pensait qu’Eugène était mort en sauvant l’humanité du trou noir. Alors, le propos sur le réel pouvoir de l’attachement des êtres humains les uns pour les autres avait eu une raisonnante particulière. Elle rougit parce qu’elle avait bégayé un peu, mais comme depuis le début de cette sortie, elle ne s’en offusquait pas vraiment. Elle sentait que quoiqu’elle fasse ou presque, Eugène continuerait de la regarder avec ce même air qui lui plaisant tant. Il était si agréable de ne pas se sentir jugée pour une fois.

Aussi elle n’hésita pas à venir se lover contre lui après avoir déposé un baiser sur ses lèvres, comme elle en rêvait depuis qu’ils avaient quitté la petite échoppe. Elle tira le plaid sur elle et récupéra la télécommande, mais réflexion faite, elle la posa sur l’accoudoir à nouveau, parce qu’elle voulait l’embrasser encore, comme sur la passerelle, mais cette fois dans la chaleur rassurante. Pour sur, elle n’allait jamais se laisser de ces sensations délicieuses d’être tout contre lui. Elle ne savait pas exactement quelle hormone son corps décidait de sécréter à ce moment précis, mais c’était plus fort que tous les antidépresseurs et tous les anxiolytiques qu’elle avait eu à prendre au cours de sa vie.
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# Re: And there's a mysterious way about you dear, have I known you 20 seconds or 20 years?Mar 4 Oct - 18:16
La dernière fois qu’Eugène avait visité l’appartement de Fanella, il n’était encore qu’un fantôme solitaire qui avait passé ses nuits à regarder la ville vivre et le temps avancer par la fenêtre. Aujourd’hui il pouvait sentir le chauffage qui montait doucement, les petites odeurs, il pouvait percevoir le mouvement de l’air à chaque fois que la jeune femme passait près de lui. Elle ne se rendait sans doute même plus compte de ces petits détails mais c’était tout pour lui. Et chaque regard qu’elle lui lançait ravivait sa joie de vivre et la réalité de leur relation nouvelle. Alors il avait pris son courage à deux mains pour lui proposer de venir sur le canapé, comme un vrai couple, pour la serrer dans ses bras et regarder un film puisque c’était ce qu’elle avait imaginé plus tôt.

Alors qu’il s’était installé à côté du canapé pour tenter tant bien que mal de se glisser dessus, la sonnerie de l’interphone retentit et il fit un bond effrayé dans son fauteuil. Son cœur s’emballa d’angoisse car ils n’attendaient personne et le visage de Fanella ne le rassura pas. Un instant, il posa sa main sur sa montre en se demandant s’il devait à nouveau appuyer sur le cadran. Il s’imaginait avec terreur des agents venus l’emmener après l’avoir retrouvé. Il ne comptait pas se laisser faire. Il s’interrompit pour la regarder répondre, sentant son dos tendu comme si on y avait planté des aiguilles. Heureusement, elle se tourna vite vers lui, soulagée, et il le fut aussi en entendant ses paroles.

— L’infirmière est en bas avec tes médicaments et des affaires… je reviens, installe-toi.

— Oh d’accord, souffla-t-il, laissé pantois par l’émotion. C'est très bien.

Il se secoua et se glissa tant bien que mal sur le canapé. Elle sortit un plaid délicieusement doux et parfumé sous lequel il se réfugia avec beaucoup de réconfort. En attendant qu’elle revienne, il laissa même sa joue glisser sur la matière poilue et sourit. Jamais il n’aurait cru pouvoir retrouver des sensations aussi plaisantes. Lorsque Fanella revient, il avait déjà agréablement chaud et était confortablement installé.

— Enfin tranquilles, déclara-t-elle et il laissa échapper un petit rire.

Elle tenait quelques affaires dans ses mains et il fut touché de savoir que l’infirmière y avait pensé car tout cela lui était complètement sorti de l’esprit. Il aurait été dommage que la soirée soit gâchée par une douleur intempestive. Il l’observa faire son petit manège avec son ordinateur et sa télévision d’un regard intrigué, mais qui n’y comprenait pas grand-chose. Il se félicita intérieurement de ne plus trop perturber les appareils électriques, également.

— Alors, dit-elle finalement. Est-ce que tu veux voir Interstellar avec moi pour rester dans le thème de l’espace ? Bon peut-être pas en entier parce qu’il dure 4h mais… ou un documentaire ?

Eugène sourit, enchanté de cette proposition. Un film qui durait quatre heures était tout bonnement inimaginable pour lui mais il aimait l’espace et le titre le tentait bien. Un documentaire allait très certainement l’endormir, il avait besoin d’être happé dans une histoire pour rester éveillé.

— Quatre heures, tu ne fais pas les choses à moitié ! Je oréfère regarder le film cela dit, j’essayerai de tenir jusqu’au bout et sinon on regardera le reste demain ? proposa-t-il en toute innocence.

L’écran de télévision s’alluma presque comme par magie avec toutes ses couleurs et il l’observa comme un enfant qui découvrait son premier sapin de Noël. Fanella laissa l’écran en pause le temps de venir s’installer contre lui et Eugène sentit ses pommettes rougir à nouveau et son cœur s’accélérer tandis qu’il la serrait dans ses bras. Elle s’emmitoufla elle aussi dans la couverture et c’est comme s’ils étaient à l’abri de la pire des tempêtes tous les deux en dessous. Il avait tellement chaud, comme s’il venait de se glisser dans un délicieux bain capable de détendre chacun de ses muscles raidis par le froid. La sensation était grisante et lorsqu’elle l’embrassa, il s’abandonna totalement à son étreinte. Cette fois, il n’y avait rien pour les incommoder, ni le froid, ni les gens, ni les fantômes. Il put librement laisser sa main caresser ses doux cheveux, le creux de sa nuque, descendre le long de son dos. Les yeux fermés, il se laissait envouter par sa délicieuse odeur qui avait gardé encore un peu de celle du petit salon dans lequel ils avaient passé un si agréable moment. Le film pouvait bien attendre encore cinq minutes qu’il profite de la douceur de ses lèvres encore un instant avant de se blottir contre elle pour le reste de la soirée. Il ne savait pas s'il allait être capable de retrouver un brin de concentration pour la suite mais il ferait de son mieux.
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